L'entreprise Aluminium Dunkerque inaugure un nouveau four moins polluant et plus compétitif
03 June 2025

L'entreprise Aluminium Dunkerque inaugure un nouveau four moins polluant et plus compétitif

Reportage France

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Comment garder à flot l’industrie européenne ? Les fermetures d’usines ont augmenté de près de 25% en France l’année passée. Le mois dernier encore, le géant de l’acier ArcelorMittal a annoncé 600 suppressions de poste dans le pays, et notamment sur son site de Dunkerque, dans le nord de la France. Mais certains projets résistent mieux malgré ce contexte difficile. Dans l’agglomération de Dunkerque justement, une autre usine de métaux investit. Aluminium Dunkerque, premier producteur européen d’aluminium non recyclé, vient d’inaugurer le 15 mai un nouveau four plus économe en énergie. Et par la même occasion, se lance dans le recyclage.

Avant d’entrer dans l’usine, située dans le nord de la France, on passe devant le port dans lequel arrivent les matières premières. On voit aussi des lingots et des plaques d’aluminium prêtes à être expédiées vers des usines de voiture ou de fabrication d’emballages. Puis, on entre dans le grand hangar où se trouvent les fours. Au fond, l’aluminium rouge, liquide, déjà fondu. Devant nous, le nouveau four, le huitième, en phase de test depuis un peu plus d’un mois, de 4 mètres de haut, 10 mètres de large, avec une gigantesque porte en métal.

Un four qui ressemble à première vue à celui d’à côté. « La différence est sur les côtés des conduites de gaz et d’oxygène », nous montre Helène Debou, chargée de projet recyclage. Grâce à ses nouveaux brûleurs, ce four sera plus économe qu’un four à gaz industriel classique. 30% de moins lors de la fusion du métal. Et d’autant moins de gaz à effets de serre. « C'est un four qui va permettre de produire 20 000 tonnes d'aluminium supplémentaires chaque année, c'est à peu près 8% de notre production. C'est un investissement de 13 millions d'euros. Donc les lingots que nous allons produire sont principalement à destination du secteur automobile », détaille Guillaume de Goÿs, le président d’aluminium Dunkerque.

Dix emplois directs ont été créés, sur un peu plus de 700 salariés déjà en poste. Autre particularité de ce four, il servira en partie à recycler de l’aluminium, une nouveauté pour le groupe. « Nos clients demandent de plus en plus de l'aluminium recyclé et on a besoin de beaucoup moins d'électricité pour recycler l'aluminium que pour produire de l'aluminium primaire. », explique-t-il. À l’échelle du site, chaque lingot fabriqué émettra ainsi 10% de gaz à effet de serre de moins qu’avant. Plus de la moitié de l’aluminium produit en France vient déjà du recyclage. Une activité en pleine croissance. Mais certains industriels craignent de manquer d’aluminium usagé, car beaucoup des déchets à recycler sont vendus à l’étranger.

Cyrille Mounier, délégué général d’Aluminium France, demande à l’Union européenne de poser plus de limites aux exportations. « Si en effet nos déchets partent, on aura beau avoir fait des investissements, ça n'aura pas servi à grand-chose. Il est important qu'aujourd'hui l'Europe se réveille et se dise : "on a classé l'aluminium comme stratégique en 2023". Si c'est stratégique pour l'Europe, il faut qu'on mette en place des mécanismes pour garder ce métal sur notre territoire. Si on veut décarboner et qu'on veut maintenir un approvisionnement local, il faut qu'on puisse garder ces déchets sur le territoire », estime-t-il.

Une idée qui aiderait à faire baisser les prix de l’aluminium à recycler. Et qui éviterait aussi qu'il parte aux États-Unis où il n'est pas soumis aux droits de douane décrétés par Donald Trump. Mais l’idée de restreindre les exportations ne met pas tout le monde d’accord dans la filière : les entreprises qui récupèrent et trient l’aluminium avant qu’il soit recyclé sont contre et veulent pouvoir continuer de vendre au plus offrant.