Héritage des JO 2024: les paralympiques professionnels entre fatalisme et désillusions [4/10]
23 July 2025

Héritage des JO 2024: les paralympiques professionnels entre fatalisme et désillusions [4/10]

Reportage France

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Que reste-t-il de Paris 2024, dans nos souvenirs, dans la société et dans la ville ? À 48 heures du premier anniversaire de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques, suite de notre série de reportages sur l'héritage laissé par cet été sportif marqué par une réussite populaire, y compris lors des Jeux paralympiques à la fin du mois d'août. Mais s'ils ont largement contribué à changer le regard du public sur les sportifs en situation de handicap, les parasportifs peinent encore à tirer les bénéfices de cette exposition, et leurs compétitions sont retombées dans un relatif anonymat.

Le 2 juin, lors de la première journée de l'Handisport Open au stade Charléty et devant un public clairsemé, Timothée Adolphe, vice-champion paralympique du 100m malvoyant, remporte l'épreuve. Mais un souci de starting-block au départ fait glisser son guide, Charles Renard. La course à peine terminée, les deux hommes ne laissent pas passer l'incident.

« Il y a huit mois, on avait les Jeux, l'année dernière, on était ici et tout était neuf pour les Jeux. Mais maintenant, on repart dans l'amateurisme. Aujourd'hui, on pouvait faire un gros chrono, franchement, je suis dégoûté. Les blocks sur le stade d'échauffement sont presque mieux que ceux sur la piste de compétition. »

Des sponsors moins présents

Une réaction épidermique, mais symptomatique d'un milieu ballotté entre désillusion et fatalisme sur l'après-Jeux. Fini les tribunes pleines et les soirées enfiévrées pour les paralympiens au Stade de France, au pied de la tour Eiffel ou du pont Alexandre III. L'engouement est retombé, et avec lui les promesses de lendemains meilleurs pour des sportifs et notamment leur confort matériel. Dimitri Pavadé, 4ᵉ du saut en longueur l'an passé, n'est pas le plus à plaindre. Mais les moyens n'ont guère évolué...

« Nous, on investit dans nos stages avec l'équipe de France. Moi, je n'ai jamais connu ça auparavant. Il y a des jeunes qui arrivent, qui sont obligés de payer leur stage plein pot alors qu'ils n'ont pas forcément d'aide, qu'ils sont étudiants et commencent seulement à travailler. C'est très compliqué. »

Compliqué, aussi, de continuer de rivaliser avec l'élite internationale sur le long terme sans sécurité financière. Or les sponsors sont devenus plus frileux et des contrats n'ont pas été renouvelés. L'Agence Nationale du Sport reste alors souvent la principale interlocutrice des athlètes pour leur assurer un avenir au plus haut niveau. Arnaud Litou, manager de la performance paralympique : « Pour les athlètes avec un profil de potentiel médaillable, on a un engagement d'assurer un seuil de revenus annuels, 40 000 euros brut par an, qui nécessite qu'on aille chercher des partenaires ou qu'on mette des fonds d'État pour assurer d'atteindre ce seuil. C'est tout le chemin à parcourir pour en arriver là, où on doit accompagner les athlètes en fonction de leur niveau de pratique et de leurs besoins également ».

Continuer les efforts et les financements

Mais si les financements publics restent primordiaux, ils se fragilisent dans le contexte budgétaire actuel. Le privé doit donc aussi prendre sa part, et il y trouvera son compte, rappelle Gaël Rivière, joueur des Bleus du cécifoot devenu président de la Fédération française handisport.

« Nous, ce qu'on dit de manière globale, c'est qu'avec le parasport, on a quelque chose qui est porteur de valeurs et de messages. Il y a beaucoup de belles histoires à raconter et à accompagner. C'est un vrai appel qu'on continue à faire auprès des partenaires, en leur disant : "N'interrompez pas vos efforts en vous disant qu'on reviendra un ou deux ans avant les Jeux." Si on veut récolter demain les fruits d'un travail, il faut commencer dès maintenant. »

Pérenniser l'effet positif des Jeux paralympiques, un travail de longue haleine pour que les 75 médailles récoltées à Paris 2024 ne deviennent pas le simple souvenir d'une parenthèse désenchantée.

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