Faute de place spécialisée, Kahil est privé d'école, à neuf ans et gravement handicapé
18 November 2024

Faute de place spécialisée, Kahil est privé d'école, à neuf ans et gravement handicapé

Reportage France
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En France, certains parents sont en grand désarroi. Alors qu'une dizaine de millions d'élèves sont scolarisés, d'autres enfants restent sur le banc de touche et peinent à trouver une place dans un établissement en raison de leur handicap. On estime qu'ils sont au total 11 000 à attendre une place dans un Institut médico-éducatif. Parmi eux, il y a Kahil, 9 ans qui est né avec un handicap moteur et mental. Rencontre avec Kahil, ses parents Iteb et Jean-Christophe Moreno et sa sœur Inaya, dans un parc de jeux à Gênas, dans la banlieue lyonnaise.

C'est un petit bonhomme de neuf ans qui ne tient pas en place, nous dit sa maman : « Il adore jouer, il bouge beaucoup, beaucoup, beaucoup. Il a vraiment besoin de contact avec les gens. Il est demandeur de cela. C’est un enfant qui a la joie de vivre. » Et c’est aussi l’avis de son père Jean-Christophe : « On a du mal à l'arrêter, c'est le genre de petit garçon où l'on cherche le bouton pour l'éteindre, parce qu'il est toujours en train de courir, sauter. » 

Khalil souffre du syndrome de Rubinstein-Taybi (SRT), une maladie rare qui engendre un retard physique et mental. Âgé de neuf ans, Kahil a l'âge mental d'un enfant d'un an et demi, il ne parle pas. On comprend facilement que même le dispositif Ulis, qui propose au sein de l'établissement scolaire un enseignement adapté, n'est pas fait pour lui. « C’est un bon dispositif, mais ce n'est pas adapté au handicap de Kahil, parce que Kahil est handicapé à 80 %, déplore sa maman, Iteb. C'est pour cela qu'il lui faut une école adaptée. Il est inscrit dans plusieurs écoles spécialisées. On appelle des IME (Institut médico-éducatif, NDLR) Il est sur liste d'attente, cela fait six ans. On a eu beaucoup de refus, personne ne prend Kahil. » 

Pourtant, le petit garçon pourrait progresser et s'épanouir. Mais pour cela, il a besoin d'une approche pluridisciplinaire dispensée justement par un IME, comme l'explique Jean-Christophe, son papa : « Dans ces instituts, on a des professionnels de chaque métier, des psychomotriciens, des psychologues, des kinésithérapeutes et du coup un corps médical qui va pouvoir l'accompagner tout au long de sa "scolarisation", pour qu'au moins, ils puissent le faire progresser. » 

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« Rien n'est adapté pour les enfants handicapés »

Seulement, le nombre de places en IME n’a pas évolué depuis 20 ans. Iteb dénonce l’hypocrisie des dirigeants quand ils parlent d'écoles inclusives : « Dans leurs discours, c'est "On inclut les enfants handicapés". Dans la réalité, ce n'est pas du tout le cas, rien n'est adapté pour les enfants handicapés, c'est un calvaire. Donc ce n'est pas de l'inclusion, c'est tout l'inverse. » 

Faute de solution, Iteb et Jean-Christophe ont eu l'idée d'ouvrir un Big Top, un immense parc de jeux pour occuper et s'occuper de leur fils. « Il faut toujours être sur le qui-vive. Regardez, depuis tout à l'heure, je reste avec Kahil, je le surveille parce qu'on ne sait jamais. Il n'y a pas de moment de répit, à part quand il dort. » 

Pas de scolarisation donc pour Kahil et forcément des conséquences sur la vie familiale. L'enfant de neuf ans prend beaucoup de place. Mais Inaya, sa petite sœur en robe de princesse ce jour-là, n'éprouve pas de jalousie. Du haut de ses six ans, elle comprend que ses parents s'occupent particulièrement de Kahil. « Ce n'est pas grave. Moi, je sais faire, je n'ai pas besoin d’aide et j'aime mon grand frère, plus que tout. »

La petite fille prend les mains de Kahil, qui balance ses bras, et lui chante une chanson.

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