En ce mois de commémoration sur l'esclavage, la Guadeloupe, rend hommage ce 27 mai aux milliers de victimes mises en esclavage. C'est l'occasion d'évoquer le Code noir, ce texte juridique qui réglementait la vie des esclaves dans les colonies françaises. Contre toute attente, le 13 mai dernier, des députés interpellent le Premier ministre demandant l'abolition de ce texte.
Lors des questions hebdomadaires au gouvernement dans l'hémicycle, Laurent Panifous, président du groupe Liot – Liberté, Indépendants, Outre-Mer et Territoires – interpelle le Premier ministre François Bayrou : « L'heure est venue de se laver de cette ignominie qu'est le Code noir au nom de la justice réparatrice. »
« Le Code noir est un texte juridique qui a été demandé par l'administration de Colbert qui, à l'époque, était ministre de la Marine, rappelle Éric Mesnard, historien. Louis XIV signe le texte qui concerne les colonies françaises d'Amérique : la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane. L'article le plus connu, c'est celui qui concerne ce qu'on appelle le marronnage, suite à la fuite de la plantation. Si un esclave quitte la plantation, la première fois, il sera marqué au fer rouge et il aura une oreille coupée. La deuxième fois, il aura le jarret coupé, on le mutilera. La troisième fois, ce sera la mort.
La quatrième catégorie d'articles, ce sont ceux qui sont probablement les plus choquants dans le livre parce qu’ils sont d'une froideur excessive – ce sont des juristes qui écrivent ces textes. Ce sont les articles qui définissent le statut de l'esclave comme un bien meuble/immeuble, qui peut être vendu, qui peut être légué par héritage. »
En ce mois de commémoration, plusieurs communes, comme celle de Beaumont-sur-Oise en région parisienne, inaugurent une stèle et plantent un arbre de vie, symbole de liberté pour rendre hommage à ces milliers de femmes, d'enfants, d'hommes arrachés à leur terre natale et mis en captivité. Dans les discours qui s’enchaînent, la condition des esclaves est évoquée. « L'esclavage n'a pas été qu'un système d'exploitation, c'était une entreprise d’effacement. Effacer les noms, les langues, les identités », insiste une oratrice. « Le Code noir promulgué en France en 1685 leur déniait même la qualité d'homme », appuie un autre.
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Une histoire qui résonne encore au sein des associations mémorielles afro-antillaises. Certains craignent qu'abolir le texte revienne à faire comme s'il n'avait jamais existé. « Il faut qu'il y ait des traces de ce qui existait pour qu'on n'oublie pas et que ça ne se reproduise pas », estime une dame. Un autre s'interroge : « Ils veulent le retirer ou l'effacer de l'histoire ? C'est pas pareil. Mais s'il le retire pour le faire disparaître comme dans les livres d'histoire quand on était à l'école, c’est pas bon ! »
Une histoire à transmettre aux générations futures, c'est l'une des missions de la Fondation pour la mémoire de l'esclavage. « Une fois qu'on a abrogé ce code, quels sont les moyens supplémentaires que l'on met en place pour transmettre cette histoire ? Que faisons-nous des inégalités en outre-mer qui sont directement liées à l'histoire de l'esclavage ? », demande Aïssata Seck, directrice de cette institution. Le Premier ministre s’est engagé à abolir le Code noir en promettant un texte prochainement au Parlement.
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