Le quartier de Jebel Timan, à l'ouest de Juba, est l’un des endroits où l’épidémie de choléra continue, malgré une campagne de vaccination et des efforts de la part des autorités sanitaires et de l’ONG MSF pour informer la population. En cause : l’absence de système d’assainissement, l’accès quasi inexistant à l’eau potable, mais aussi la présence d’une immense déchetterie, située en plein cœur de la zone résidentielle.
De notre correspondante à Juba,
Accroché à une colline rocailleuse, le quartier de Jebel Timan est peuplé de maisons en bambou et en torchis. Des habitations à étage se dressent aussi çà et là, inachevées, dans ce quartier qui reste l’un des plus sous-développés de la capitale sud-soudanaise. Un quartier toujours en proie à l’épidémie de choléra.
En janvier, Albino Diari Wornyang, le pasteur de la communauté, a brutalement perdu son frère de 75 ans à cause de la maladie. « C’est arrivé le 13 janvier. Il a commencé à être malade à 4 heures du matin, et il est mort le même jour à 15 heures, se rappelle le pasteur. Nous l’avons emmené dans une clinique à 6 heures du matin. Ils lui ont donné sept perfusions d’affilée. Puis le docteur nous a dit de le ramener à la maison pour qu’il se repose. Mais une fois qu’on est arrivés chez nous, il est mort »
Une campagne de vaccination s’est déroulée fin janvier dans la communauté et la famille proche d’Albino Diari Wornyang a été vaccinée. Mais le pasteur reste inquiet : « Nous restons vigilants, car le choléra est toujours parmi nous, et il y a encore des gens qui n’ont pas été vaccinés. »
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Une déchetterie en plein cœur du quartierSi personne ne sait exactement comment le choléra est arrivé jusqu’ici, les premières victimes ont été rapportées parmi les nombreux récupérateurs de déchets qui survivent en fouillant dans l’immense décharge située en plein cœur de Jebel Timan. Trois d’entre eux sont morts au mois de décembre.
« Les quartiers de Juba qui n’ont pas de déchetterie n’ont pas eu autant de cas de choléra. Mais nous ici, nous avons eu beaucoup de cas et des gens sont morts, dénonce Matthew Buya, le chef traditionnel du quartier, qui souhaite la fermeture de ce site. Hier encore, un homme a dû être emmené au centre de traitement du choléra de Gurei. »
Il est d’autant plus difficile de contenir l’épidémie qu’il n’y a aucun système d’assainissement à Jebel Timan et un seul puits d’eau potable, payant, pour plus de 6 000 personnes. L’immense majorité des habitants boit l’eau de puits creusés dans la terre, comme celui que nous montre Justin Pasi Major, un voisin. Une sorte de flaque d’eau profonde, entourée de pierres et d’herbe, au bord de laquelle traînent des bouteilles en plastique : « L’eau elle-même est propre. Mais si par exemple des chèvres viennent boire ici, elles peuvent contaminer l’eau avec des bactéries, explique cet habitant. Le problème, c'est qu’il n’y a pas de barrière autour du puits. Mais si nous pouvions en construire une, et si nous le creusions plus profond et utilisions du chlore, alors nous serions protégés. »
Les appels de la communauté pour la construction de nouveaux puits, de latrines, ainsi que pour la fermeture de la déchetterie sont pour l’instant restés sans réponse.
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