Au Congo-Brazzaville, un an après les inondations, les défaillances sanitaires dans la Likouala
Il y a près d’un an, le Congo-Brazzaville subissait les pires inondations de son histoire récente. Les dégâts ont été considérables : 1,79 million de personnes ont été affectées et 525 400 personnes, soit un Congolais sur douze, ont eu besoin d’une assistance humanitaire. Alors que les pluies arrivent et que le risque de nouvelles inondations est réel, les habitants redoutent de revivre le cauchemar de l'an dernier, notamment sur le plan sanitaire. Dans la Likouala, département le plus touché et le plus éloigné de la capitale, les craintes sont fortes.
De notre envoyée spéciale de retour de la Likouala, dans le nord-est du Congo,
Dans le village de Boyélé-Port, la tonnelle qui abrite Ornella du soleil a servi de lit surélevé en début d'année, quand il a fallu accoucher de ses jumeaux. « Pendant les inondations, nous nous étions réfugiés sur une bande de terre avec nos sept autres enfants, témoigne-t-elle. Quand les douleurs ont commencé, mon mari m'a ramenée ici en pirogue. »
Les difficultés ne se sont pas arrêtées là pour Ornella et ses nouveaux-nés : « Le premier enfant est sorti. Celui qui était venu m'aider ne savait pas qu'il y en avait un autre. Pendant qu'il prenait soin du premier, le deuxième est sorti et il est tombé dans l'eau, raconte Ornella. On a sorti le bébé de l'eau, on l'a réanimé. Dieu merci, les deux ont survécu. Mais nous souffrons toujours, nous manquons de nourriture. »
À deux heures et demie de route, la directrice de l'hôpital de référence de Bétou, docteure Fanny Eteka, manque de moyens et de personnel pour assister les femmes dans les villages quand l'eau monte. « Quand il y a des inondations, les déplacements sont impossibles et les femmes sur le point d'accoucher se retrouvent coincées, constate la directrice d'hôpital. Elles n'ont pas d'aide de personnel médical. Si l'accouchement réussit, Dieu merci, s'il ne réussit pas, parfois, il y a des décès que nous n'enregistrons pas, car quand il y a des décès là-bas, on enterre directement et nous ne recevons pas l'information du décès. Donc, cela peut aussi fausser notre statistique. »
À Ikpengbele, au moins sept enfants sont morts faute de soins suffisants lors des inondations
Autres conséquences sanitaires des inondations, les maladies liées à l'eau souillée, et la destruction des cultures qui aggrave le risque de malnutrition.
À Ikpengbele, village de 5 000 habitants, Gédéon Boazou, infirmier bénévole, gère le centre de santé intégré, où les médicaments et l'équipement médical ont manqué pour faire face aux besoins quand la rivière Oubangui a envahi le village.
« Il y a beaucoup de problèmes, surtout la diarrhée, les dermatoses, la malnutrition, la vaginose, chez les femmes, liste l'infirmier. Il y a aussi beaucoup de cas de malnutrition chez les femmes et les enfants et si on n'intervient pas, la personne meurt. Nous avons eu des morts à cause de la malnutrition, surtout des enfants. »
Selon Gédéon Bouazou, au moins sept enfants sont morts faute de soins suffisants lors des inondations. Pour faire face cette année, il a déjà reçu et stocké une aide du Programme alimentaire mondial, organisme de l'ONU.
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