Le jazz africain, vedette du Dakar Music Expo
22 February 2025

Le jazz africain, vedette du Dakar Music Expo

Reportage Afrique
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Depuis jeudi 20 février, le Dakar Music Expo (DMX) se tient dans la capitale sénégalaise, un grand rendez-vous pour les professionnels de la musique d’Afrique et d’ailleurs. Au programme : des rencontres, des conférences et des concerts. Et pour sa 6ᵉ édition, le thème de cette année est le jazz africain, un genre musical qui reste assez niche sur le continent, mais qui peut très bien s’exporter avec une bonne stratégie.

De notre correspondante à Dakar,

« On pense qu’il n’y a pas de jazz en Afrique », c’est ce qu’affirme, volontairement provocateur, Mawuto Dick, du festival Togo jazz. Le genre souffre d’une mauvaise presse, et Kossi Mawun, batteur togolais, le ressent depuis qu’il s’est lancé en solo en 2019 : « C'est très difficile de gagner sa vie en tant que musicien de jazz en Afrique. Ici, en Afrique, on aime danser, on aime se défouler, écouter de la variété. Peu de personnes écoutent le jazz. »

Pourtant, de nombreux rendez-vous existent sur le continent, comme à Saint-Louis ou à Ouagadougou, preuve d’une grande richesse du jazz africain. Mais il manque encore d’une promotion suffisante. « Il n'y a pas assez de représentations, il n'y a pas assez de marketing autour de ça, estime Dudu Sarr, l’un des créateurs du DMX. Il n'y a pas assez de ressources financières qui sont mises dans la promotion et l'exportation des musiques africaines. »

À écouter dans le Grand invité AfriqueDudu Sarr (Dakar Music Expo): «La visibilité des artistes africains francophones est en baisse»

Mettre en avant sa singularité

Pour Dudu Sarr, l’un des arguments de vente du jazz africain est de réclamer la maternité de ce genre, créé par les Afro-Américains, descendants d’esclaves aux États-Unis. Il faut aussi mettre en avant sa singularité, inspirée des nombreuses traditions propres à chaque pays.

« Lionel Loueke, qui est un guitariste très émérite, un Béninois qui accompagne Herbie Hancock, il fait du jazz, mais par contre, il s'inspire de sa tradition béninoise pour composer, argumente Mawuto Dick, de Togo Jazz. Même quand on prend Angélique Kidjo, certains de ses chants viennent des courants vaudous. »

Un attrait des festivals étrangers

Les festivals étrangers, comme Marseille jazz des cinq continents, veulent faire une place à ce jazz africain. Pour son directeur, Hugues Kieffer, le Dakar Music Expo est un lieu idéal de rencontres. Il veut montrer aux jeunes talents qu’il existe une grande scène jazz dans le monde : « Il faut qu'ils aient la conscience, je pense, de leur identité à travers la scène. Et justement, de ne pas singer ou de ne pas rentrer dans des modèles qu'on leur donnerait, défend le directeur du festival Marseille jazz des cinq continents. Sans atteindre justement les millions, on peut rencontrer une audience qui est intéressée. Et à travers le monde, il existe aussi une autre scène qui est aussi très intéressante et qui permet d'exprimer différemment, peut-être, ce qu'on est. »

Dudu Sarr, également promoteur musical, se bat pour placer ses talents. Il a conclu un partenariat avec le grand festival allemand Jazzahead! et leur propose chaque année plusieurs artistes. À Marseille, le bassiste Alune Wade sera sur scène cette année.

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