WIC, club d'investisseuses ivoiriennes pour dirigeantes «Wictorieuses»
15 July 2025

WIC, club d'investisseuses ivoiriennes pour dirigeantes «Wictorieuses»

L'Afrique en marche

About

À Dakar et à Abidjan, les associations WIC (Women’s Investment Club) ont été créées en 2016 et 2018 pour accompagner, financer des entreprises, portées par des femmes. À Abidjan, depuis deux ans, cette association se regroupe pour désigner vingt lauréates auxquelles l'association apporte conseil et financement. Reportage.

Ce jour-là, dans un grand hôtel d'Abidjan, les adhérentes du WIC Côte d'Ivoire cooptent pour la 2e année consécutive, 20 femmes. Des femmes patronnes de PME, dont les projets ont retenu l'attention de leur sœur entrepreneuse. Manon Karamoko Coulibaly est la directrice régionale de la société pharmaceutique Novartis, mais elle est aussi la présidente du WIC Abidjan. Elle nous explique le sens de ce club de dirigeantes ivoiriennes qui ressemble à une tontine des temps modernes. 

« En fait, ce sont des femmes qui ont décidé de mettre leur épargne en commun pour investir dans les entreprises de femmes. On sait que naturellement, dans les banques traditionnelles, c'est un peu difficile d'obtenir des prêts en général pour les entrepreneurs, mais encore pire pour les femmes parce que la confiance n'y est pas. Donc, nous avons décidé de mettre nos épargnes à contribution. Nous recrutons des femmes que nous mettons dans des cohortes que nous accompagnons. D'abord parce que c'est quand même un investissement, ce n'est pas un don. Il s’agit plus souvent, d'ailleurs, de prises de participation dans leur capital, parce que ce sont des petites entreprises qui ont besoin de grandir. Quand on prend des prises de participation, ce qu'on fait, c'est qu'on a toujours un ou deux de nos membres qui vont siéger au conseil d'administration et permettre de guider l'entreprise. Donc, au-delà du retour sur investissement, c'est beaucoup plus l'impact que ces entreprises-là auront dans cinq ou sept ans que nous visons afin qu’elles soient beaucoup plus grandes, beaucoup plus pérennes, beaucoup plus solides. »

Pour cela, le Women's Investment Club ne se contente pas de financer des projets portés par des femmes, mais a mis en place une académie, un cercle de réseaux d'affaires et même – quand cela est nécessaire – un coaching et de l'accompagnement psychologique ce qui est primordial pour Manon Karamoko Coulibaly. 

Beaucoup plus grandes, beaucoup plus pérennes, beaucoup plus solides

« Je dis toujours qu'on ne coache pas une femme de la même manière qu'on coache un homme, encore moins en Afrique, parce que les femmes ont des situations personnelles à gérer qui vont impacter leur manière de gérer leurs activités professionnelles. Il faut gérer les enfants, il faut gérer la famille, les parents, il faut être disponible et quand on a une activité à plein temps et qu'on s'investit là-dedans en général, ça sera au détriment de tout celaDes difficultés auxquelles l’époux n’est parfois pas étranger », souligne la patronne du WIC.

« En fait, il considère que l'activité de la femme, son business devient littéralement un concurrent parce que lui, il souhaite que son épouse soit dévouée à lui et à la famille. Les hommes n'ont pas encore compris l'utilité d'avoir une femme qui est active. Une femme qui est active n'est pas aux antipodes avec une femme qui est investie dans sa maison, bien au contraire. Donc notre but, c'est de renforcer ce qu’elles veulent. Une fois qu’elles ont confiance en elles, qu'elles sont soutenues par un réseau, les résultats sont juste fantastiques ! ». 

Femi Yéo a 40 ans. Elle est mère de trois enfants, ingénieur en logistique et transport, elle a été l'une des premières à bénéficier des financements du Women's Investment Club. Sa société Wood Packaging Industry fabrique à Grand Bassam des palettes en bois. 

« L'entreprise reste dans la main de l'entrepreneur. Eux, ils sont là en appui et en soutien. Donc dès que j'ai besoin d'aide sur un aspect, on active le réseau. Si je souhaite par exemple rencontrer le DG de telles entreprises, démarcher une société potentiellement cliente et qu'une dame du WIC la connaît, elle facilite le rendez-vous. C'est vraiment cet appui-là qu'on a derrière nous et qu'on n'a pas quand on bénéficie du financement d’une banque ». 

Les femmes savent gérer un portefeuille, c'est un gage de stabilité

L'expérience réussie de ces deux années d'entrepreneuriat féminin attire de nouveaux partenaires financiers. Ainsi, cette année, une banque a décidé de s'associer au WIC de Côte d'Ivoire pour participer aux appels de fonds. Antoine Resk Diomandé, Directeur Général de la Fondation de la Banque Atlantic Groupe, atteste de cet intérêt : « Les femmes savent gérer un portefeuille et c'est vrai que c'est un gage de stabilité. Les femmes remboursent et donc forcément, elles sont une assurance pour nous. Et c'est vrai qu'être partenaire du WIC par exemple, qui va permettre de sélectionner les profils, les former, nous donnera un certain gage, permettra à la banque de mieux prêter ». 

Les deux clubs d'affaires exclusivement féminins regroupent entre Dakar et Abidjan, 260 membres. La branche ivoirienne du WIC a réussi à lever en deux ans près de 430 000 000 de francs CFA, 650 000€, pour faciliter l'épanouissement de PME ivoiriennes dirigées par des femmes.