La France est le premier exportateur mondial de pommes de terre destinées à la transformation. Mais aujourd'hui, l'Union nationale des producteurs de pommes de terre dénonce des pressions commerciales « intenables » exercées par des industriels belges qui pourraient déséquilibrer l'économie du secteur.
La Belgique accueille sur son sol de nombreuses usines de transformation, qui achètent la grande majorité des pommes de terre destinées à finir en frites ou en chips. Or, « certains industriels belges », pour reprendre les termes du communiqué de l'Union des producteurs français (UNPT), profiteraient de leur leadership pour tirer les prix à la baisse.
Il faut savoir que la plupart des pommes de terre de transformation sont vendues via des contrats annuels, mais 10 à 15% sont commercialisées hors contrat, au gré des besoins des acheteurs, à un prix qui est donc variable.
Prix en baisse de 40%Ces dernières semaines, sur ce marché libre, le prix de ces pommes de terres industrielles (variété Fontane) a chuté de 40%. Une dégringolade en partie orchestrée par des opérateurs belges qui avaient probablement des stocks et auraient sciemment décidé de moins acheter pour faire baisser les prix, selon l'UNPT.
Ces industriels montrés du doigt ont aussi d'autres stratégies de pression : un des gros opérateur belge aurait revu à la baisse de 10 à 20% ses promesses d'achats faites aux agriculteurs et aux négociants, sous prétexte d'avoir surestimé ses besoins. Or, les agriculteurs s'apprêtent à planter et ne peuvent plus réduire leurs surfaces.
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Stratégie de saturation du marchéTout ce que cet opérateur majeur de la transformation n'achètera pas dans le cadre d'un contrat sera remis sur le marché libre, à la fin de la prochaine récolte, qui débute à partir de septembre. Et cet excédent sera forcément payé moins cher.
« Le risque, c'est que le contexte de prix prépare les esprits à l'idée que la pomme de terre a perdu de sa valeur et complique les négociations de prix sur les futurs contrats », explique un expert de la filière.
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La demande de frites en pleine croissanceCes mauvais signaux sur les prix sont contradictoires avec un marché très porteur pour les cinq à dix années qui viennent. La demande mondiale de frites est en effet en croissance constante, et le nombre d'usines de transformation est appelé à se multiplier d'ici à 2030.
Mais « devancer la demande, en produisant trop dès maintenant comme certains industriels incitent à le faire, dans une stratégie de sursaturer le marché, s'avère risqué pour les prix », prévient un de nos interlocuteurs. Le constat qui est fait aujourd'hui en est l'illustration.
Des prix trop bas pourraient décourager les agriculteurs qui s'apprêtaient à arriver sur le marché pour répondre à la croissance de la demande qui se profile, prévient l'UNPT.
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