Une demande qui ne cesse d'augmenter, mais des prix qui sont au plus bas. C'est le paradoxe du marché du lithium, un métal clé pour les batteries électriques. Ceux qui en parlent le mieux sont les opérateurs miniers eux-mêmes.
Les opérateurs miniers ne font pas semblant que tout va bien. Ce serait difficile face à des cours mondiaux qui ont chuté d'environ 90% en deux ans, un contexte qui a eu pour conséquences des rachats d'entreprises, des licenciements et retardé des projets.
Réunis la semaine dernière à Las Vegas pour une conférence organisée par Fastmarkets sur les matières premières pour batteries, les opérateurs miniers ont partagé leurs états d'âme. Jon Evans, le PDG de Lithium Americas, une entreprise qui construit la plus grande mine de lithium du Nevada, reconnaît traverser « des périodes d'euphorie, suivies de moments de souffrance et de douleur ». D'autres expliquent qu'« après le déni l'année dernière, le temps de l'acceptation est venu », comme le rapporte l'agence Reuters. La période est très difficile, mais le secteur est toujours perçu comme stratégique.
Une offre toujours trop abondanteCe qui fait mal à la filière, c'est l'offre trop abondante : les opérateurs miniers se sont engouffrés ces dernières années dans le secteur du lithium. « Il est difficile d'imaginer un avenir dans lequel le lithium ne jouera pas un rôle central » justifie Paul Lusty, responsable de la recherche sur les matières premières des batteries chez Fastmarkets.
La Chine est l'un des principaux moteurs de la surproduction, elle pourrait dépasser l'Australie l'année prochaine comme premier producteur mondial. Contrairement aux miniers australiens qui ont réduit la cadence, les chinois n'ont que très peu ralenti, même si l'activité n'est pas rentable dans les conditions actuelles de prix. D'ici 2035, les mineurs chinois devraient extraire 900 000 tonnes de lithium, contre 680 000 tonnes pour l'Australie, 435 000 tonnes pour le Chili et 380 000 tonnes pour l'Argentine, selon les prévisions de Fastmarkets.
En face, la demande en lithium est importante. Elle a augmenté de 24 % l'année dernière et augmentera potentiellement de 12% par an dans la prochaine décennie selon le même cabinet d'expert, mais cela ne suffit pas à rétablir la balance.
Un déséquilibre parti pour durerL'avenir dépendra des besoins et de la capacité des opérateurs miniers à lever le pied. Project Blue, un cabinet de conseil sur les métaux, prévoit une demande qui pourrait tripler d'ici 2040. Il y aura donc forcément un point de bascule. Selon les sources, la demande pourrait dépasser l'offre à partir de 2030, voire un peu plus tard. Cela veut dire encore plusieurs années qui s'annoncent rudes pour les investisseurs qui tentent actuellement d'économiser là où ils peuvent, notamment sur les coûts d'exploitation.
En attendant, les licenciements continuent. SQM, le géant chilien du lithium, a annoncé la semaine dernière se séparer de 5% de ses effectifs. Le numéro un mondial Albemarle avait lui, dès l'année dernière, annoncé des suppressions de poste pour compenser la faiblesse des prix.
À lire aussiLes prix bas du lithium pèse toujours sur l'essor des projets miniers