Le baril de pétrole sous la barre des 70 dollars, nouvelle référence du marché?
05 March 2025

Le baril de pétrole sous la barre des 70 dollars, nouvelle référence du marché?

Chronique des matières premières
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Les cours du pétrole ont dévissé depuis lundi 3 mars et sont passés largement sous la barre des 70 dollars — contre 80 dollars mi-janvier. Le déclencheur a été une annonce faite par plusieurs producteurs de pétrole, membres de l’Opep+, des pays qui depuis 2022 ont réduit leur production.
 

Ils sont huit et parmi eux figurent les gros producteurs que sont la Russie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Tous sont membres de l’Opep+ et tentent en vain depuis de longs mois de faire remonter les prix, en laissant volontairement sous terre des barils de pétrole pour réduire l’offre. Mais cette stratégie ne s’est pas révélée efficace, car la demande mondiale est en berne. Cette approche a aussi fait perdre des parts de marché aux pays pétroliers concernés qui ont annoncé plusieurs fois leur intention de mettre fin à leurs restrictions, sans passer à l’acte.

La pression de Donald Trump a sans doute accéléré les choses : lors du Forum de Davos, fin janvier, il a demandé avec insistance à ces géants de l’or noir de produire plus pour faire baisser les prix. Une question urgente pour le président des États-Unis, car un pétrole bas : « c’est bon pour les consommateurs américains, pour l’industrie et globalement pour l’économie américaine », résume Francis Perrin, directeur de recherche à l’IRIS et chercheur associé au Policy Center for the New South à Rabat.

Le message est passé : les huit pays pétroliers se sont engagés à ne plus modifier leur calendrier et à augmenter leur production à partir du 1ᵉʳ avril. 

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Un effet sur les prix immédiat

D'ici à quelques semaines, il y aura donc plus de pétrole sur le marché, et cela a suffi à faire baisser les cours qui évoluent désormais sous la barre des 70 dollars le baril.

Cette baisse des prix est aussi alimentée par le contexte actuel de guerre commerciale. Les nouveaux droits de douane américains et les représailles qu’ils entraînent vont, a minima, ralentir l’économie mondiale. S’il y a moins de croissance, sans même parler de récession, la consommation de pétrole va s’en ressentir, explique Francis Perrin. D’où cette baisse des prix, de manière anticipée.

Un baril durablement sous les 70 dollars ?

Il n’est pas exclu de voir le baril se maintenir sous la barre des 70 dollars, selon plusieurs analystes. Mais si la baisse s’accentue, ce sera risqué pour les pays producteurs. D’abord pour les États-Unis, qui sont tiraillés entre des intérêts divergents liés à leur statut de premier producteur mondial et de premier consommateur : si le baril baisse trop, le pétrole de schiste américain ne sera plus rentable, car il coûte plus cher à extraire que celui du Moyen-Orient. Or Donald Trump ne veut surtout pas que la production ralentisse. 

Un autre pays a tout intérêt à manœuvrer pour que les prix ne s’effondrent pas beaucoup plus bas : c’est l’Arabie saoudite qui a engagé un vaste programme de réformes. Le géant du secteur, Saudi Aramco, comme d’autres majors pétrolières, a vu ses bénéfices de 2024 reculer pour la deuxième année consécutive, un recul de plus de 12 %. Le fleuron de l’économie saoudienne espère cependant distribuer 85 milliards de dollars de dividendes en 2025.

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