L'inquiétude envahit les marchés agricoles depuis une dizaine de jours. Les prix du soja, du maïs, du blé, mais aussi du colza ont chuté de plusieurs pour cent. Une baisse qui reflète la crainte de voir les exportations américaines pâtir des droits de douane à l'importation pris, en rétorsion, par les pays visés par les taxes Trump.
Les marchés sont guidés par la peur de voir les importateurs qui se fournissaient aux États-Unis, première puissance exportatrice agricole mondiale, changer en partie de fournisseurs pour protester contre les taxes imposées par Donald Trump.
Le premier pays concerné est la Chine qui a acheté plus de la moitié des exportations américaines de soja en 2024 et qui vient de mettre en place des taxes à l'importation sur plusieurs produits américains. Les craintes viennent aussi du Mexique qui a acheté 40 % du maïs américain l'année dernière, même si Donald Trump a fait un geste envers le pays, en suspendant l'essentiel des taxes annoncées pour tenter d'éviter des mesures de rétorsion de la part de Mexico.
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Retrait massif des fonds d'investissementOr tout ralentissement des exportations américaines pourrait créer un excédent dans le pays et ferait baisser les prix, c'est ce que les acteurs du marché anticipent, surtout les fonds qui avaient misé en masse sur le maïs, en espérant le revendre plus cher. Ce n'est pas l'esprit du moment, ces fonds se sont donc précipités depuis dix jours pour revendre leurs contrats et éviter de perdre de l'argent. Cela donne une impression artificielle qu'il y a plus de maïs sur le marché, et c'est ce qui explique la chute libre des cours du grain jaune.
Par ricochet, et parce que l'inquiétude est généralisée, les autres céréales et oléagineux cultivés aux États-Unis ont aussi été tirés vers le bas.
Prix en baisse aux États-Unis et en EuropeCes prix à la Bourse de Chicago ont un impact aussi sur les prix européens qui doivent s'adapter à la chute du dollar qui renchérit la valeur des céréales européennes et contraint les exportateurs à baisser leur prix pour ne pas perdre en compétitivité, explique Damien Vercambre, du cabinet Inter-Courtage.
Les prix du colza ont eux baissé en raison de la crainte de voir arriver sur le marché européen des volumes de colza canadien, qu'on appelle le canola, volumes qui étaient jusque-là transformés en huile et exportés aux États-Unis pour l'industrie du biodiesel et qui pourraient ne plus trouver preneur.
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Perspectives flouesImpossible de dire dans combien de temps le marché trouvera un nouvel équilibre, car la moindre déclaration de Donald Trump peut inverser la tendance. Aux incertitudes actuelles, il faut ajouter celles liées à la volonté du président américain de taxer les navires chinois et donc notamment ceux qui transportent des matières premières. Une déclaration « suffisamment vague pour faire peur à tout le monde », résume Damien Vercambre.
Ce qu'il y a de nouveau par rapport à la dernière présidence Trump, c'est qu'à l'époque, seule la Chine était visée. Depuis le mois de janvier, les sanctions sont beaucoup plus larges, et donc la désorganisation potentielle des flux commerciaux plus grande.
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