Les opérateurs télécom européens face au défi de la régulation
11 March 2025

Les opérateurs télécom européens face au défi de la régulation

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Le Congrès international des opérateurs mobiles vient de s’achever à Barcelone. Grand-messe d’un secteur qui nous concerne tous. Mais ce qui y a notamment occupé les esprits, c'est le retard des opérateurs européens face à leurs homologues américains. Décryptage.

Les opérateurs de télécommunications mobiles européens sont en retard par rapport à leurs concurrents américains. C’est un fait, d’autant que ce retard est visible ces dernières années, notamment en matière d’innovation, d’investissement et de déploiement de nouvelles technologies comme la fibre ou la 5G. La 5G est justement un bon exemple puisqu’elle a commencé à être déployée à l'automne 2018 aux États-Unis. Pour les Européens, il aura fallu attendre deux ans pour capter de la 5G, et aujourd’hui, le continent n'est pas encore entièrement couvert.  

Deux marchés très différents 

C’est le visage du marché qui est l’une des premières explications de cette situation. Sur le continent européen, il est très éclaté, fragmenté, avec des dizaines d'opérateurs. On en compte à peu près 80, comme Orange, Vodafone ou encore Telefonica. La concurrence y est donc féroce et les prix sont en moyenne cinq fois moins élevés que les forfaits américains. Aux États-Unis, justement, le marché du réseau mobile est dominé par quelques grands acteurs internationaux. Ils se comptent sur les doigts d'une main. Citons par exemple T-Mobile, AT and T ou encore Verizon. D'après une étude publiée par le Cabinet Deloitte en février, au sein des membres de l'UE, le nombre moyen d'abonnés par opérateur est de 4,5 millions contre tenez-vous bien 95 millions aux États-Unis. C'est 21 fois plus. 

Les Européens limités 

On pourrait dès lors penser que les Européens puissent se regrouper pour faire face aux Américains. Les grands groupes l’ont d’ailleurs redemandé à la Commission européenne fin 2024. Mais il y a une subtilité, c'est d’ailleurs l'un des cœurs de leur problème, c'est que les fusions d'opérateurs mobiles sont très encadrées et régulées au sein de l'Union européenne. Il n'y a pas de champions européens à proprement parler mais des champions nationaux, sans aucun doute ! Pour faire simple, un petit opérateur national n'aura de facto pas les moyens d'investir tandis qu'un gros opérateur national lui pourrait manquer de fonds pour le faire, des fonds qu'il pourrait trouver dans sa fusion avec le petit. Un chiffre le prouve, depuis 2020, seulement deux fusions d'opérateurs ont eu lieu en Europe contre quatre en Amérique du Nord. 

S’ouvrir à d’autres marchés 

Pour faire face, les opérateurs européens ont leur stratégie pour exister, tout simplement en investissant sur d'autres marchés. Remarquant que leur taux de croissance sur le sol européen était atone voire négatif, ils vont voir ailleurs. Leurs revenus réels y ont diminué de 4,4% d'après l'agence Connect Europe. Illustration avec le Français Orange, leader européen sur le continent africain. Son activité au Moyen Orient et en Afrique constitue 16 % de son chiffre d'affaires. Une tendance toujours à la hausse parce qu'Orange est implanté dans 17 pays du continent mais aussi et surtout parce que le marché africain est l'un des plus dynamiques au monde.  

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Car finalement, derrière cette situation, il est surtout question de souveraineté des États européens, chacun souhaitant héberger son champion. Mais ça pourrait changer. Plusieurs rapports dont le rapport Draghi sur la compétitivité de l'UE préconise de consolider le marché européen des télécoms avec des fusions de groupes. Car en fait, l'ambition est bien de trouver un savant équilibre entre compétitivité et règles de compétition !