La liste électorale a été publiée mercredi 4 juin, et c’est officiel : le nom de l’opposant Tidjane Thiam y est introuvable. En réalité, seule « la confirmation était attendue, » pointe Jeune Afrique, et c’est donc « sans grande surprise » qu’elle a été annoncée, admet Africanews. Sur ce point, la presse est unanime, et L’Observateur Paalga conclut : « on ne voyait pas très bien comment les indésirables d’Abidjan auraient pu se tirer d’affaire. »
« Les » indésirables, au pluriel, car Tidjane Thiam n’est pas le seul exclu : ni Laurent Gbagbo, ni Guillaume Soro, ni Charles Blé Goudé n’ont obtenu leur ticket – ces derniers « en raison de leur condamnation judiciaire », rappelle Jeune Afrique. Et quand bien même, ils ont bénéficié d’une grâce présidentielle, seule « une amnistie pleine et entière » les aurait « remis en selle, » précise encore L’Observateur Paalga.
Dans le cas de Tidjane Thiam, leader du PDCI, c’est encore un peu différent : lui aussi a « fait face à la rigueur de la justice, » raconte Africanews, cette fois en raison d’une « décision judiciaire qui remet en question sa nationalité ivoirienne au moment de son inscription » sur les listes – puisqu’il disposait à l’époque de la nationalité française.
Quelles réactions des intéressés ?Du côté du PDCI, cela ne fait pas un pli, raconte Fraternité Matin : « le parti septuagénaire conteste cette décision, et exige la réintégration immédiate des personnalités concernées. »
Mais en réalité, au-delà des prises de parole, la formation n’a plus beaucoup d’options et est même dans « l’impasse judiciaire nationale, » estime JA ; le Pays au Burkina Faso juge carrément que « les carottes sont cuites pour les leaders de l’opposition ». Une révision de la liste électorale étant exclue, un « revirement spectaculaire » du pouvoir étant improbable puisque, tance le journal, le pouvoir « se claquemure dans un silence assourdissant », ne reste qu’une option pointée par Jeune Afrique : « le droit international » et « la saisine du comité des droits humains des Nations unies », déjà annoncée. En plus, bien sûr, des appels à la mobilisation, qui risquent d’aggraver encore « la tension politique croissante » pointée par le magazine.
Bref, s’inquiète L’Observateur Paalga, « on se demande si l’on s’achemine une fois de plus vers des élections tumultueuses. » Or, juge Le Pays : « il faut éviter à tout prix de réveiller les vieux démons. La Côte d’Ivoire (…) n’a pas besoin de ça. » Conclusion : « le président Alassane Ouattara doit savoir se montrer bon prince en calmant le jeu. »
Le Sénégal s'intéresse à la situation ivoirienneEn témoigne la visite il y a quelques jours du Premier ministre Ousmane Sonko, sur laquelle revient Jeune Afrique. Deux jours de déplacement fin mai, au cours desquels, raconte le magazine, le chef du gouvernement sénégalais a « rend[u] visite à Laurent Gbagbo », avec qui il partage « les mêmes idées souverainistes et panafricanistes » et « estime que les années passées en prison les rapprochent. »
En revanche, pointe JA toujours, « le cas de Tidjane Thiam (…) n’a pas été évoqué officiellement ».
Il faut dire que le dirigeant sénégalais ne souhaitait pas ternir ses relations avec Alassane Ouattara, « avec lequel il a évoqué le renforcement de l’axe Abidjan-Dakar ». Ce souhait a été répété auprès du premier ministre Robert Beugré Mambé avec qui il a, cette fois, évoqué les nombreux accords de coopération entre les deux pays, et surtout avec qui il a convenu « d’organiser un forum afin de promouvoir les opportunités d’investissements dans leurs pays respectifs ».
Chantiers politiques aussi au SénégalLes chantiers politiques sont également sur le calendrier au Sénégal, avec cinq jours consacrés à un dialogue national sur le système politique. Soit « plusieurs jours d’intenses concertations », qui ont permis, s’enthousiasme Dakar Matin, « d’ouvrir une voie nouvelle pour la refondation du système politique. »
À quelques milliers de kilomètres de là, Le Pays est moins dithyrambique, et rappelle que plusieurs partis politiques ont boycotté le dialogue, « dont ils remettent en cause la sincérité » et jugent que « l’organisation est biaisée ». Alors le titre s’interroge : cette initiative « répond-elle à des calculs politiques » ou traduit-elle véritablement « une volonté d’assainir le système » ? Quoi qu’il en soit, toutes les bonnes volontés du monde ne sauraient compenser « l’absence d’acteurs majeurs » qui, déplore Le Pays, « pourrait impacter négativement la portée de ce dialogue qui se voulait (…) celui de la refondation ».
Il y a pourtant urgence, s’agace un éditorialiste de Dakar Matin : « les principaux adversaires de la République sont la corruption, l’enrichissement illicite, la haute trahison », contre lesquels la population souhaite que des mesures soient prises. « Jusqu’ici le soutien est immense », mais, prévient cet auteur, c’est un soutien sous conditions : « que les nouveaux gouvernants sachent que le peuple écoute et entend. »