À la Une: le Mali sans partis politiques…
29 April 2025

À la Une: le Mali sans partis politiques…

Revue de presse Afrique

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Le Mali est-il en train d’emboîter le pas au Niger et au Burkina Faso, où les partis politiques ont été dissous, sur ordre des généraux au pouvoir ? Hier, à Bamako, la phase nationale de la consultation des forces vives du pays sur la relecture de la Charte des partis politiques a été lancée. Les légitimités traditionnelles ou religieuses, notamment, ainsi que les Maliens établis à l’extérieur, sont invités à formuler des propositions pour réduire le nombre de partis politiques et encadrer leurs financements.

Pour sa part, la classe politique malienne s’insurge. Elle dénonce depuis plusieurs semaines un complot, une mise en scène destinée à la faire disparaître. Et dans la presse malienne, le débat est vif…

Prédateurs ?

Pour certaines publications, à l’instar de L’Aube, oui, les partis n’apportent rien au pays, au contraire, ils l’ont ruiné…

« Il est tout de même curieux, affirme le quotidien bamakois, de voir que ceux qui dénoncent aujourd’hui un supposé “complot“ contre les partis sont, pour la plupart, eux-mêmes impliqués dans des affaires de détournement de fonds publics, encore enfouies ou en cours de traitement. Ce sont ces mêmes figures qui, pendant plus de trois décennies, pointe L’Aube, ont bénéficié de milliards de francs CFA issus du Trésor public, officiellement destinés à la formation aux valeurs républicaines (…). Or, les voilà aujourd’hui à affirmer que les Forces vives de la Nation, ce même peuple qu’ils étaient censés éduquer, ne seraient pas “assez outillées“ pour discuter de la Charte des partis politiques. Quelle ironie !, s’exclame encore L’Aube. N’est-ce pas là un aveu d’échec de leur propre mission ? Ou bien, pire encore : ont-ils simplement détourné ces fonds à d’autres fins, sans jamais réellement former la population ? »

Magouilleurs ?

Sahel Tribune est sur la même ligne… « Pendant plus de 30 ans, les partis politiques ont été au faîte de la gouvernance des affaires publiques. Et le peuple attendait comme résultats des retombées positives telles que promises par les pères de l’instauration de la démocratie multipartite. Hélas, déception totale, s’exclame le site malien, sur fond de mensonges, de magouilles et de connivence contre l’État. (…) C’est sous le règne de ces partis politiques au pouvoir que l’on a vu naître une nouvelle oligarchie composée de fonctionnaires milliardaires et de nouveaux opérateurs économiques sortis du néant. Face à cette déception, n’était-il pas mieux que le peuple se prononce formellement sur l’avenir des partis politiques ? Et c’est ce que les autorités ont entrepris. »

La démocratie mise en sourdine ?

Non, rétorque le média malien Arc-en-ciel, repris sur le site Malijet : « Depuis leur arrivée au pouvoir, les dirigeants de la Transition avaient promis de remettre le pays sur les rails, en mettant l’accent sur la refondation de l’État. Toutefois, ces derniers mois, les signaux sont préoccupants, pointe Arc-en-ciel. La mise en sourdine du débat démocratique, les restrictions des libertés d’expression, et maintenant cette menace qui pèse sur l’existence même des partis politiques, trahissent une dérive autoritaire. La question n’est pas de nier les dysfonctionnements qui ont marqué la vie politique malienne ces dernières années. Oui, certains partis ont failli à leur mission de représentation, reconnait le média malien. Oui, le système mérite d’être repensé. Mais cela ne justifie en rien une dissolution brutale et unilatérale qui risquerait de plonger le pays dans une nouvelle crise, cette fois politique et institutionnelle. »

Légitimer les coups d’État ?

Pour Ledjely en Guinée, « personne n’est dupe. La désertification de l’espace politique malien : c’est bien l’objectif ultime qui sous-tend cette fameuse relecture de la charte des partis politiques. En cela, les propositions phares issues des concertations organisées au niveau régional sont suffisamment illustratives. Des propositions émanant de “forces vives“ dont la composition est à la seule discrétion des autorités et la légitimité plus que douteuse. (…) Pour les autorités maliennes et la frange des forces vives dont elles se prévalent, les partis politiques sont subitement le mal incarné, pointe encore Ledjely. De fait, ce discours nous a été servi pour légitimer tous les coups d’État que la région a enregistrés depuis bientôt cinq ans. Sauf qu’il passe de moins en moins, estime le site guinéen, vu qu’avec le recul, on sait que les militaires, eux non plus, ne sont pas la solution-miracle. »