C'est un territoire aussi grand que la République démocratique du Congo, mais peuplé de seulement 57 000 habitants. Convoité par le président américain Donald Trump pour ses minerais, le Groenland souffre d'un manque de main d'œuvre et fait appel à des travailleurs immigrés
De notre envoyée spéciale de retour de Nuuk,
Dans les hôtels, les cafés, les restaurants de Nuuk, de nombreux travailleurs viennent de Thaïlande ou des Philippines. Mais pour discuter avec eux, il faut aller sur les hauteurs de la ville, sur une colline enneigée. Dans l'église catholique du Christ-Roi, une des rares églises catholiques de la ville, la communauté philippine se retrouve le dimanche en fin d'après-midi. La messe a lieu en anglais avec quelques chants philippins.
« Il y a beaucoup de Philippins là où je travaille. L'entreprise aime bien salarier des gens de notre communauté, car nous ne ratons pas un jour de travail. On répond toujours présent et on travaille dur », témoigne cette jeune femme, venue directement du travail. Elle est caissière dans un supermarché du centre-ville et porte encore son uniforme. Elle met de côté systématiquement une partie de son salaire pour l'envoyer à ses parents qui s'occupent de sa fille de quatorze ans restée aux Philippines. Elle ne cache pas les difficultés que peuvent rencontrer les migrants au Groenland : « Sans connaître déjà quelqu'un ici, c'est difficile de trouver un emploi au début et un employeur qui puisse aider à obtenir un permis de travail. »
Des Philippins et des Thaïlandais ont commencé à s'installer au Groenland il y a plus d'une dizaine d'années déjà. Ils représentent 3 à 4% de la population. Le patronat aimerait avoir plus d'autonomie pour faire venir des travailleurs étrangers. « Nous n'avons pas de chômage ici. Nous avons besoin d'étrangers », explique ainsi Christian Keldsen, directeur de l'Association des entreprises du Groenland, qui estime qu'il y a à peu près mille postes à pourvoir sur cette île qui compte moins de 60 000 habitants. Parmi les raisons, les difficultés d'accès des Groenlandais à l'enseignement supérieur, mais pas seulement : « 50% de jeunes qui vont au Danemark pour étudier à l'université ne reviennent pas. »
Le Groenland manque de travailleurs dans les services à la personne, le commerce. À cause de cette fuite des cerveaux, il manque aussi d'infirmiers et d'infirmières, de médecins, de comptables ou d'avocats pour les étrangers qui veulent pourvoir ces postes-là. Obtenir un permis de travail reste toutefois fastidieux. Une antenne locale de l'Agence danoise de l'immigration va ouvrir ses portes à Nuuk en octobre, ce qui devrait faciliter les démarches des travailleurs étrangers et des entreprises.
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