C’est l’une des meilleures écoles d’ingénieurs en Europe et même au monde. L’École polytechnique fédérale de Zurich (ETH), en Suisse, a annoncé qu’elle allait renforcer ses critères d’admission pour les nouveaux étudiants ou professeurs venant de 23 pays classés à risque, soit à risque d’espionnage. Une mesure qui ne passe pas auprès des étudiants chinois, particulièrement nombreux.
De notre envoyé spécial à Zurich,
Anders Hagström, le directeur des affaires internationales de l’École polytechnique de Zurich, l’assure depuis le début : « Ce n’est pas une liste noire, ce n’est pas une interdiction... Scanner les demandes d’admission n’a rien de nouveau. Mais avec le contexte géopolitique actuel, on a réalisé qu’on devait le faire de façon plus systématique, en plus d’être plus transparent, affirme-t-il. Tous les pays que nous avons identifiés sont soit sous embargo, soit sanctionnés par nos partenaires, l’Union européenne ou par les États-Unis. C’est juste un document pour dire à nos services : regardez, là, nous devons faire attention à cette candidature si nous voulons respecter la loi ».
En plus de la nationalité, l’ETH va regarder de quelle université provient l’étudiant, si elle est adossée à l’armée par exemple, si elle a délivré une bourse, si l’étudiant étudie dans un domaine sensible, avec des applications possibles dans le domaine civil et militaire (ce qu’on appelle les technologies duales). « Il n’y a qu’une seule technologie qui n’est pas duale, c’est le nucléaire. Tout le reste, la cybersécurité, la robotique, les drones, la chimie — on pense aux armes chimiques —, les maths appliquées même, puisque ça touche à l’intelligence artificielle, liste Anders Hagström, presque tous les enseignements peuvent avoir des applications duales. »
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Des tags ETH = nazis retrouvés sur les murs de l’écoleConcrètement, la Russie, l’Afghanistan, l’Iran, la Corée du Nord sont concernés, mais ce n’est rien en comparaison de la Chine. L’an passé, l’ETH Zurich a accepté plus de 1300 étudiants chinois. Le chiffre pourrait chuter brutalement l’an prochain. « J’ai eu ma licence aux États-Unis et je suis venu à Zurich justement parce que j’avais peur de ne pas pouvoir continuer mes études là-bas en tant que Chinois. Et maintenant, ici aussi, ils décident de nous discriminer, s’inquiète Fu, le nom que l’étudiant a bien voulu donner pour répondre au micro. Je suis vraiment déçu. Je comprends que l’espionnage inquiète la Suisse, mais les étudiants chinois ne sont pas des espions ! Ok, notre gouvernement est peut-être capable de ce genre de trucs, mais pas les étudiants. »
La grogne est telle que des tags ETH = nazis ont été retrouvés sur les murs de l’école. L’ambassade de Chine, elle, s’est dite choquée par les nouvelles mesures. Quant à la direction, elle dit simplement appliquer la législation en vigueur. D’autant que les services de renseignements suisses ont déjà alerté les universités du pays quant au risque d’espionnage.
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