La scène culturelle berlinoise qui fait partie intégrante de l’image de la capitale allemande est-elle menacée ? Après des années d’augmentation de ses dépenses, la ville doit faire de sévères économies dans tous les domaines. Le secteur culturel n’y échappe pas. Les ultimes arbitrages pour le budget 2025 sont attendus ce mardi.
De notre correspondant à Berlin,
Ils étaient quelques centaines dimanche dernier au cœur de Berlin pour protester contre les coupes budgétaires de la municipalité. Le monde de la culture également présent est aux abois. Les 130 millions d’euros d’économies dans ce secteur, soit 10 à 12% ont provoqué une levée de boucliers et une forte mobilisation.
« Ce qui nous a choqués, ce sont des annonces très tardives, l’absence de discussions avec l’administration, se désole Iris Laufenberg, directrice du Deutsches Theater, un des grands théâtres berlinois aussi concerné par ces mesures. Nous ne comprenons pas si un projet à long terme existe. On fait des économies. On nous accuse de nous adresser à des élites qui devraient disparaitre. Et nos dirigeants ne sont même pas des extrémistes comme ailleurs. »
L’adjoint à la Culture Joe Chialo, un chrétien-démocrate, est attaqué de toutes parts, y compris par ses camarades de parti, comme l’ancienne ministre de la Culture d’Angela Merkel, Monika Grütters, qui a parlé de mesures « cruelles et vides de sens ». L’intéressé se défend et estime que la culture doit trouver des financements privés. « Nous sommes conscients qu’il s’agit de mesures douloureuses, mais elles sont inévitables. C’est aussi le cas d’ailleurs pour beaucoup d’autres villes en Allemagne. À Berlin, nous anticipons et nous réfléchissons à la meilleure manière de surmonter cette crise », s'explique-t-il.
La mobilisation du monde culturel a contraint la coalition au pouvoir à Berlin, associant les chrétiens aux sociaux-démocrates à réagir. Les économies globales ne sont pas remises en cause, mais des théâtres publics comme le Deutsches Theater seront moins frappés. D'autres ont vu les coupes budgétaires disparaitre. Les économies inchangées risquent de frapper la scène culturelle indépendante ou underground, les ateliers d’artistes, les studios de répétition et autres lieux qui font la richesse et la renommée de Berlin.
Sabine Kroner, porte-parole du conseil des arts de Berlin qui regroupe de nombreux artistes et groupes, fait part de ses inquiétudes : « Je crois que l’attractivité de Berlin depuis la chute du mur grâce à ce terreau très créatif va souffrir. Si c’est le choix des responsables politiques, alors notre ville demain ne sera plus ce qu’elle est aujourd’hui. »
Les clubs qui font aussi la réputation de Berlin ont des difficultés. La moitié d’entre eux pourraient fermer. Le monde de la culture devra continuer son combat quels que soient les derniers arbitrages pour 2025. D’autres coupes sont annoncées pour 2026. L’adjoint à la Culture, Joe Chialo, n’aura peut-être plus à les gérer. On parle de lui comme possible ministre de Friedrich Merz si ce dernier devient chancelier dans quelques semaines.