Énorme succès populaire dans la capitale, les Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 ont été suivis, selon le Comité international olympique, par près de cinq milliards de personnes dans le monde. Le milieu sportif français espérait tirer bénéfice de la réussite des Jeux, tant sur les politiques sportives publiques que sur la mise en lumière de certaines disciplines. Or, quatre mois après la cérémonie de clôture des Jeux olympiques, l'heure est plutôt au désenchantement.
Que l'ambiance de fête semble loin : feux d'artifice éteints, vasque démontée, symboles olympiques et paralympiques décrochés et sourires envolés. Baisses annoncées de budget des acteurs publics, incapacité matérielle des clubs à accueillir de nouveau licenciés, l'après-Jeux, censé ouvrir des perspectives, ne laisse qu'un goût amer dans la bouche de Philippe Bana, le président de la Fédération française de handball. « Le post-olympique devait être, non pas enchanté, il ne faut pas rêver, mais on en attendait trois millions de pratiquants, une sécurisation et surtout une conscience que le sport, c'est un des rares trucs de la société française qui peut fabriquer de l'éducation, de la société, rassembler les gens, déplore Philippe Bana. Et tu ne parles pas de ça derrière. Il faut vraiment que les gens prennent conscience que ce truc peut aider la France à ne pas sombrer. »
Pas coulé, mais déjà bien touché : le dispositif de deux heures de sport supplémentaires au collège testé dans le contexte des JO pour lutter contre la sédentarité des ados ne s'appliquera plus qu'aux zones d'éducation prioritaire. Un mauvais signal pour la championne olympique de sabre Manon Apithy-Brunet : « Le sport, c'est bien pour la santé mentale, mais aussi pour la santé physique, rappelle la championne. Donc, me dire qu'on supprime au fur et à mesure ça... On a déjà des problèmes avec les écrans, donc si on n'ouvre pas le côté sportif aux jeunes, qu'est-ce qu'on va devenir plus tard ? Je pensais que ces Jeux olympiques montreraient des belles valeurs et finalement, on les a montrées, mais on ne s'accroche pas forcément. Donc, ça me rend un peu triste. »
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Le budget des sponsors en forte baisse
Pour les médaillés, récolter les fruits de la gloire ne sera pas simple. Paris 2024 a asséché les budgets des sponsors, devenus plus sélectifs. Si Léon Marchand, Teddy Riner ou les frères Lebrun n'ont pas grand-chose à craindre, Nicolas Gestin, qui a décroché l'or en canoë, appréhende la période : « Pour un sport un peu mineur comme le canoë, c'est toujours particulier pour retrouver des entreprises prêtes à continuer l'aventure avec moi et aussi profiter quand même un peu de la médaille, qui m'offre quelques opportunités pour trouver une plus grande assise financière. Parce qu'en plus de ça, mes saisons vont me coûter, entre guillemets, plus cher parce que j'ai tout intérêt à me faire accompagner plus que je ne l'étais avant. Donc voilà, il y a du boulot et c'est un peu le nerf de la guerre de ces prochains mois. »
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Et la situation risque d'être encore plus délicate pour les parasportifs. Le nageur Alex Portal redoute l'opportunisme et le manque de suivi des partenaires. « Certains ont voulu dire, on veut soutenir des sportifs paras, et ceux qui se désengagent après les Jeux, ça montre une facette qui est un peu malsaine, je trouve, déplore le sportif. Finalement, c'était pour quoi ? Est-ce que c'était vraiment humain derrière tout ça ? Donc, voilà, on est contents de ceux qui continuent à pousser dans cette direction-là, parce que dans le para, il n'y a pas forcément d'argent, mais en tout cas, c'est en faisant ces efforts-là que, peut-être un jour, on aura la reconnaissance, comme aux Jeux olympiques. »
Si l'aspect le plus durable des Jeux reste pour l'heure la construction ou la rénovation d'infrastructures, le mouvement sportif attend désormais bien plus, à commencer par une vraie loi « héritage » pour honorer toutes les promesses d'un bel été.
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