
France: Jordan Bardella se prépare-t-il déjà à remplacer Marine Le Pen en 2027?
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Le Rassemblement national, toujours en tête des sondages pour les prochaines élections, traverse une période d’incertitudes autour de sa candidature à la présidentielle de 2027. Condamnée à cinq ans d’inéligibilité en mars 2024, Marine Le Pen voit planer le doute sur sa capacité à se présenter. De plus en plus d’indices laissent penser que Jordan Bardella est en train de se mettre en ordre de marche pour prendre le relais.
Le signe le plus marquant ? Une série de sondages récents, très favorables au RN dans son ensemble, mais particulièrement flatteurs pour le président du parti. Le trentenaire arriverait en tête du premier tour, quel que soit son adversaire, et remporterait même le second tour dans la plupart des cas si l’élection avait lieu demain. Bien sûr, à deux ans de l’échéance, ces chiffres sont à prendre avec précaution. Ce qui frappe davantage, c’est que désormais dans les instituts de sondage, seul Jordan Bardella est testé comme candidat RN. Marine Le Pen, elle, a quasiment disparu des hypothèses. La principale intéressée a d’ailleurs esquissé ces dernières semaines un calendrier de retrait. Interrogée sur une radio nationale, la cheffe de file des députés RN a déclaré que si sa condamnation était confirmée en appel – décision attendue à l’été 2026 – elle passerait immédiatement le flambeau sans attendre un éventuel pourvoi en cassation qui, même s’il aboutissait avant 2027, interviendrait trop tard pour mener une campagne sereine.
Jordan Bardella en campagne... pour son livrePendant ce temps, Jordan Bardella sillonne la France pour promouvoir son deuxième livre, Ce que veulent les Français (plus de 40 000 exemplaires vendus). L’ouvrage ressemble à s’y méprendre à un programme présidentiel. Il parle beaucoup à la première personne, développe une vision et ne cite Marine Le Pen qu’une seule fois – un hommage court mais chaleureux à son « mentor ». À chaque dédicace, la foule est au rendez-vous : files d’attente interminables, selfies à la chaîne… et même un enfarinage, un rite de passage presque obligé pour tout prétendant sérieux à l’Élysée.
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Ne pas enterrer Marine Le PenAu sein du parti, pourtant, personne n’ose encore briser publiquement le tabou. « La période qui nous sépare de l’été prochain ne pose aucun problème », assure un proche de Marine Le Pen, qui continue d’afficher son « grand espoir » d’être relaxée en appel. Publiquement, la double finaliste de la présidentielle répète qu’elle n’a « absolument pas renoncé ». Le RN prend d’ailleurs soin, dans ses communications sur les bons sondages, d’afficher côte à côte les photos de Marine Le Pen et de Jordan Bardella.
En privé, l’ambiance est différente. Plusieurs cadres et interlocuteurs récents décrivent une forme de résignation chez la présidente d’honneur du parti. « On a parfois l’impression qu’elle fait un peu semblant d’être suspendue au verdict et d’y croire encore », confie l’un d’eux – tout en reconnaissant que sa combativité reste intacte, notamment lors des débats budgétaires à l’Assemblée nationale.
Chez les alliés ciottistes de Reconquête comme au Palais-Bourbon, on est plus direct. On se prépare ouvertement à une campagne Bardella. Les adversaires du RN, eux, ont bien compris la séquence. Ils attaquent déjà durement le jeune président du parti sur son manque d’expérience et mettent en doute sa capacité à tenir une campagne présidentielle de longue haleine. Pour le Rassemblement national, l’exercice consiste donc, pour l’instant, à marcher sur un fil : maintenir l’unité derrière Marine Le Pen tant que l’espoir juridique existe, tout en laissant Jordan Bardella monter doucement en première ligne. Un numéro d’équilibriste qui pourrait durer encore de longs mois.