Entre une légende du rap sud-africain et un poète angevin, mon cœur balance…
Notre 1er invité est Stogie T pour la sortie de l’EP Shallow
Vétéran du hip-hop sud-africain, Stogie T (Tumi Molekane) n'est pas un parolier classique. Son travail consiste à trouver un équilibre délicat entre différents mondes ; il a prouvé qu'il était la voix du peuple, mais il n'hésite pas à tendre un miroir à l'ensemble de la société, et le reflet est toujours plus complexe que les clichés bien-pensants du «rap conscient» et la nature stéréotypée et banale du «rap commercial».
Le message dominant de Shallow est la psychose collective. Le dernier EP publié par Stogie T depuis la pandémie mondiale contient des chansons percutantes qui reflètent une forme particulière de cynisme prévalant en Afrique. Le rêve différé, la perte d'espoir sous le poids écrasant d'un État de plus en plus défaillant. Stogie T a déjà parlé de cet état, mais cette fois-ci, il se penche sur les effets qu'il a sur ses habitants. Ce qu'il advient de la pensée des gens, de leurs dysfonctionnements et de leurs pathologies.
Stogie T (alias Tumi Molekane) est sur la voie de l'autoréflexion, de l'introspection, de l'évolution et de la restitution, tout en jouant la carte du progrès. Il s'interroge sur les valeurs et les règles qui régissent notre vie, sur les raisons de désespérer ou d'espérer d'un pays entouré d'un pillage flagrant, sur les raisons d'être cynique et sur les raisons de croire et de se soucier des autres.
Les chansons de cet EP ont été conçues et enregistrées pendant Covid et entre les moments d'anxiété intense dus au dysfonctionnement et au désordre sociétal, à la perte d'amis proches et de membres de la famille, et à la disparition tragique de ses pairs. En tant qu'artiste cherchant à trouver une voix dans le désordre et à s'élever au-dessus du bruit de la machine médiatique mondiale, Stogie T a trouvé du réconfort dans la tragédie et le traumatisme. Offrant un contrepoint à l'air du temps par le biais d'une poésie artistique nous rappelant, ainsi qu'à lui-même, qu'en tant qu'artiste, c'est son travail qui apporte de l'espoir pour l'avenir, mais qu'il doit faire preuve d'un grand discernement, d'espoir pour l'avenir, mais qu'il doit rester fidèle à lui-même, à sa famille et à sa communauté.
Titres interprétés grand studio
- Shallow Live RFI
- Zimkile feat Msaki, extrait album
- Too Late For Mama Live RFI.
Line Up : Tumi Molekane (voix), Shane Cooper (basse), Bonj (voix), Bokani Dyer (claviers, voix), Clem Carr (claviers)et Justin Badenhorst (batterie).
Traduction : Enora Louis
Son : Benoît Letirant, Mathias Taylor.
► EP Shallow (Sakifo Rd 2024).
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Puis la #SessionLive invite Lo’Jo pour la sortie de l’album Feuilles Mauves.
De leur Anjou natal à tous les continents, des instruments traditionnels au rock, Lo’Jo a toujours su passer de la feuille blanche à la poésie. La lumière et les mots de Feuilles Fauves magnifient une nouvelle fois l’insaisissable. Car si nous sommes Peu de choses, écrit Denis Péan, heureusement, « on peut faire chavirer le cœur le plus fané sur le tempo du chamamé ». Il y a de ces groupes qui ne sont enchaînés nulle part si ce n’est aux instruments du monde ou aux feuilles de papier. Sans chaîne ni code ni dogme, Lo’Jo sera toujours ces explorateurs de la musique, ces chercheurs des mots. Le collectif Lo’Jo continue avec Feuilles Fauves à puiser dans ce qu’il sait faire de mieux : ne rien se refuser. Pourquoi ne pas mêler le kamele n’goni, instrument acoustique malien au violon, pourquoi ne pas faire fusionner le piano au kayamn, sur toile d’électro, pour donner à ce disque, aussi, les couleurs des Mascareignes ?
Chaque disque est une réinvention : Feuilles Fauves n’y fait pas exception. Par ses traditions musicales absorbées lors de leurs innombrables voyages, comme par ses collaborations prestigieuses : de Robert Wyatt à Tony Allen, Robert Plant, Tinariwen, Erik Truffaz, ou encore Archie Shepp... l’utopie Lo’Jo a « le pouvoir d’hypnotiser et de ravir à chaque morceau » (Billboard).
Des feuilles de l’automne aux feuilles de papier Le titre Mandiego, qui ouvre ce nouvel album, aux notes de piano douces et enveloppantes, est une invitation bienveillante au nouveau voyage que nous offre Lo’Jo. Car « l’Homme est bien peu de choses mon ami. Si le soir il est hasard, le matin il est destin », écrit Denis Péan. Feuilles Fauves est brut, comme primitif et sauvage. Aidé par la réalisation de Clément Petit (entendu aux côtés de Piers Faccini ou Blick Bassy) et Alexandre Finkin, les voix pénètrent l’esprit, les instruments du monde régalent le corps avec une intensité vivante et organique. Parce que malgré le chaos du monde, Lo’Jo nous invite avec Feuilles Fauves à un périple solaire : grâce à cette langue inventée, au créole comme aux sons du monde et d’ailleurs. Grâce aux textes sensibles, parfois espiègles ou envoûtants. Grâce à l’étincelle de Jupiter & Okwess sur deux titres, à la malice de Mélissa Laveaux dans Julie, non plus en chanteuse mais en lectrice pétillante.
Feuilles Fauves nous emmène danser des Valses Étranges, s’attarde sur notre vanité, interroge sur Le temps (avec René Lacaille), « le thème favori des poètes » admet Denis Péan. Celui qui s’étend et qu’on pourra donc toujours écrire. En écoutant Aswar (« ce soir » en créole maison), on s’anime en terres argentines sur le tempo du chamamé, un genre musical traditionnel de la province de Corrientes. Grâce à Brother Barrett, on découvre la communauté rasta du Pinnacle, en Jamaïque. On apprend avec eux, leur humour et leur finesse d’esprit aussi à exprimer La Kolèr, dont les mélodies entêtantes prennent des allures chamaniques.
Titres interprétés grand studio
- La Kolèr Live RFI
- Aswar, extrait de l’album
- Joséphine Live RFI.
Line Up : Denis Péan (chant, harmonium), Yamina Nid El Mourid (chant percussions), Nadia Nid El Mourid (chant percussions), Richard Bourreau (violon) et Alex Cochennec (basse).
Son : Benoît Letirant, Mathias Taylor.
► Album Feuilles Mauves (Yotanka Rd 2024).
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