
80 ans après la libération de la France, nous revisitons le procès historique du Maréchal Pétain lors de l’été 1945. « C'est un vrai procès, avec un vrai débat », déclare l’historien Julian Jackson dans les lieux même où il s’est déroulé, au sein du Palais de justice de Paris, sur l’île de la Cité. Julian Jackson est spécialiste de l’histoire de France au XXème siècle et il nous propose de revivre le procès de l’ancien chef du gouvernement de Vichy, une expérience inédite enregistrée par RFI et partagée avec notre invité Denis Salas, président de l’Association française de l’Histoire de la justice et ancien juge.
Revenons justement à l’Occupation de la France par les nazis et à cette photographie qui a tellement choqué les Français : le Maréchal Pétain, héros de la Première guerre mondiale, serrant la main de Hitler, le 24 Octobre 1940. Une photo symbole de la collaboration. C’est à la radio que le Maréchal Pétain explique alors son choix.
« Français j’ai rencontré le Chancelier du Reich. Cette première rencontre entre le vainqueur et le vaincu marque le premier redressement de notre pays. C’est dans l’honneur et pour maintenir l'unité française que j’entre aujourd’hui dans la voie de la collaboration. (…) L’armistice au demeurant n’est pas la paix (…) la France est tenue par des obligations nombreuses vis-à-vis du vainqueur, du moins reste-t-elle souveraine. Cette politique est la mienne, mes ministres ne sont responsables que devant moi. C’est moi seul que l’Histoire jugera. » C’est également à la radio que Charles de Gaulle, Chef de la France libre a fait connaitre son choix. « Un jour, la France libérée punira les responsables de ces désastres et les artisans de sa servitude. » Comme l’avait déclaré le Général De Gaulle en 1940, il s’agit en 1945 de punir Pétain mais aussi de le juger.
Le Maréchal Pétain s’est rendu à la France depuis la Suisse, fin Avril 1945 et que c’est en prison à Montrouge dans le sud de Paris, qu’il attend son procès. Un procès qui a lieu au sein de la première Chambre d’appel de la Cour de Paris du 23 juillet au 15 Août 1945. Et c’est dans cette même salle que Julian Jackson nous raconte les trois semaines du procès. Si la première semaine est marquée par le silence de Pétain, le grand évènement de la deuxième semaine, c’est l’arrivée de Pierre Laval. Joseph Kessel écrit sur « sa laideur fascinante, avec ses énormes oreilles et ses yeux reptiliens », il serait le mauvais génie de Pétain. Si l’accusation réclame la peine de mort, l’avocat principal Fernand Payen joue la carte de la sénilité tandis que le jeune et brillant Jacques Isorni, partage les valeurs de son client et met en scène une défense de rupture en assumant la collaboration de Vichy. Tous les protagonistes sont conscients que le verdict de la peine de mort sera commué en prison à vie. Mais ce procès pour l’Histoire écrit-il toute l’histoire de la collaboration de Vichy avec les nazis ? « Certainement pas, nous dit Denis Salas, il y a un moment de justice avec ce procès de 45, qui a été prolongé et complété par la suite par d’autres moments de justice (Entre 1987 et 1998, la justice française a jugé Klaus Barbie, Paul Touvier et Maurice Papon) qui ont prouvé la participation active et déterminante du régime de Vichy à la déportation des juifs de France.
À lire aussiProcès de Klaus Barbie: 30 ans après, les archives ouvertes aux chercheurs
À lire aussiL'Argentine retire à Maurice Papon une distinction reçue pendant la dictature
À lire :
Le procès Pétain. Vichy face à ses juges par Julian Jackson.
À découvrir :
Le site de l’association française pour l’Histoire de la justice présidée par Denis Salas.