Donald Trump prend officiellement ce lundi (20 janvier 2025) les rênes des États-Unis. Retour à la Maison Blanche, après quatre années dans l’opposition, pour le Républicain, plus puissant aujourd’hui que lors de son premier mandat.
L’envoyé spécial de RFI à Washington, Vincent Souriau, revient sur l’ambiance à Washington, quelques heures avant la prestation de serment du président et de son vice-président, JD Vance : la ville est remplie de partisans de Donald Trump, des familles montées à Washington pour l’investiture. Mais la cérémonie ne se passera pas en plein air à cause du froid – des températures atteignant les -20° sont attendues dans la journée. Seules 600 personnes seront présentes dans la rotonde du Capitole, et 20 000 suivront l’évènement dans une salle de spectacle, sur des écrans.
Dans les rues, les forces de sécurité sont très présentes – armée, voitures de police, contrôles. La police craint un « loup solitaire », après une campagne pendant laquelle Donald Trump a failli être assassiné. Mais explique Vincent Souriau, « cela se fait avec beaucoup de civilité, et on ne ressent pas de tension dans les rues de Washington ».
Fanny Lauby, professeure associée en Science politique à l'Université d'État de Montclair, dans le New Jersey, note que beaucoup plus d’invités que d’habitude viennent du secteur privé – notamment des dirigeants des entreprises de la tech. Ont également été invités des représentants de pays étrangers, notamment de ceux que Donald Trump considère comme amis – Italie, Hongrie... Pour Haïti, la presse du pays note que c’est le chargé d’affaires de l’ambassade d’Haïti à Washington qui sera présent.
L’investiture vue par la presse du continent américain
«Hashtag Ere Trump : retour au pouvoir», titre aux États-Unis El Diario, le quotidien en espagnol, qui a rencontré « les latinos de New York, entre peur et espérance avant le nouveau gouvernement Trump ». Espérance, parce que selon un Colombien rencontré par le journal, « les démocrates n’ont rien fait pour les migrants ou les travailleurs ». Peur parce que, comme l’écrit au Brésil O Globo, Trump met entre autres l’accent sur les expulsions et le protectionnisme. Le Brésil cherche d’ailleurs des alliés pour résister aux assauts du nouveau gouvernement. De fait, titre au Mexique La Razon, « C’est le début de temps difficiles pour le Mexique et le reste du monde ». Tout le contraire des États-Unis, affirme le conservateur Washington Times, qui parle d’un « renouveau patriotique » et se félicite de la fin de la « catastrophe Biden ». Certains essaient de limiter les dégâts : « avec les rapports commerciaux dans la balance, les chefs d’entreprise du Canada se bousculent à Washington pour l’investiture », note le Toronto Star. Le fait est que cette fois, écrit le New York Times, « Trump rencontre de la déférence, et non de la défiance ». Ce qui n’empêche pas l’éditorialiste de La Prensa, au Panama dont Donald Trump menace de reprendre le contrôle du canal, de parler d’un « retour triomphale du maccarthysme aux États-Unis ».
L’immigration, priorité affichée
Samedi dernier encore (18 janvier 2025), Donald Trump affirmait que la gigantesque opération d’expulsion de migrants dont il parle depuis sa campagne présidentielle commencerait très vite. C’est Chicago, grande ville démocrate qui serait visée en premier, explique Fanny Lauby. Par contre, on ne se sait pas si ce sont des criminels qui vont être expulsés, ou si l’administration va multiplier les raids sur les lieux de travail par exemple. En tous cas, le Sénat doit donner à Donald Trump sa première victoire sur le dossier de l’immigration lundi après-midi, en votant une loi qui permettrait l’expulsion des immigrés qui ont été accusés de crimes mineurs, sans avoir pour autant été jugés coupables.
À la frontière, Donald Trump cherche à mettre en place un état d’urgence, explique l’enseignante : il peut le déclarer en invoquant une crise à la frontière, ce qui lui permettrait de débloquer certains fonds et de déployer l’armée. Autre possibilité : mettre en place un état d’urgence médicale, qui lui avait permis à l’époque de la pandémie de fermer la frontière. Mais, remarque Fanny Lauby, il n’y a pas d’urgence médicale en ce moment, et les arrestations à la frontière sont en baisse.
Le coût des expulsions
L’envoyé spécial de RFI au Texas, Achim Lippold, a rencontré Joaquin Garcia, directeur de l’ONG Lupe, qui explique qu’une déportation massive serait très grave pour la région : « Beaucoup de familles qui vivent dans la vallée du Rio Grande comptent au moins un membre en situation irrégulière. Et souvent, ce sont les deux parents qui n’ont pas de papiers. » Et pour Fanny Lauby, on peut s’attendre à voir de nouveau des familles séparées, comme lors du premier mandat de Donald Trump, « pour décourager les familles de venir. Et bien qu’il y a eu pendant des années des enfants ‘perdus’, que l’on n’a pas réussi à remettre dans leurs familles, ça n’a posé aucun problème aux républicains à l’époque ». L’enseignante estime que les conséquences seraient économiquement désastreuses pour de nombreux secteurs : agriculture, construction, services à la personne (garderies par exemple). Et beaucoup de ces promesses vont coûter très cher, alors que pendant la campagne Donald Trump a prévu des baisses d’impôts supplémentaires. D’où, explique Fanny Lauby, cette volonté du président de déclarer l’état d’urgence, « qui lui permettrait de débloquer des fonds alloués au budget militaire, et d’utiliser ces fonds pour ne pas avoir à passer par la case Congrès pour obtenir des fonds pour financer ses expulsions ».