À l’occasion de son premier discours devant les élus américains depuis son retour au pouvoir, le président des États-Unis a déroulé le fil d’une Amérique en pleine « révolution du bon sens ».
Il a commencé son intervention en expliquant que « l’Amérique est de retour », souligne le correspondant de RFI à Washington, Guillaume Naudin. Le président américain revendique le début de mandat le plus actif et le plus réussi de toute l’histoire américaine, avec 79 décrets signés et près de 400 décisions prises durant les 43 premiers jours. Une avalanche d’annonces et de décisions qui déborde à la fois la presse et ses adversaires politiques, qui sont pratiquement sans réaction. Mis à part le représentant du Texas, Al Green, qui a bruyamment contesté que Donald Trump ait un mandat clair du peuple américain et qui a d’ailleurs été escorté jusqu’à la sortie pour cela, ils n’étaient pas très bruyants et certains d’entre eux avaient boycotté ce discours. À part quelques panneaux assez discrets, les élus démocrates ont surtout fait la grève des applaudissements. Et d’ailleurs Donald Trump l’a bien remarqué et fait remarquer.
« C’est mon 5è discours du genre au Congrès. Et une fois encore, je regarde les démocrates devant moi et je réalise qu’il n’y a absolument rien que je puisse dire pour les rendre heureux, ou les faire se lever, sourire ou applaudir. Il n’y a rien que je puisse faire. Alors les démocrates assis devant moi, pourquoi, juste pour un soir, ne pas vous joindre à nous pour célébrer tant d’incroyables victoires pour l’Amérique ? »
Il n’a pas obtenu les applaudissements recherchés, mais, tradition oblige, il a eu droit au « rebuttal », la réponse fournie par la nouvelle sénatrice démocrate du Michigan, Elissa Slotkin, qui a fait carrière dans le renseignement. Elle est donc spécialiste des questions de sécurité. Mais elle est aussi capable de parler d’économie, comme l’a fait Donald Trump et voici ce qu’elle en dit :
« Le président Trump essaie de faire un cadeau sans précédent à ses amis milliardaires. Il cherche des milliers de milliards de dollars à donner aux plus riches des Américains. Et pour faire ça, il va vous faire payer dans tous les domaines de votre vie. Les prix de l’alimentation et du logement augmentent. Ils ne baissent pas. Et il n’a pas proposé de plan pour régler l’un ou l’autre. Ses droits de douane contre des alliés comme le Canada vont faire monter les prix de l’énergie, du bois de construction et des voitures. Cela lance une guerre commerciale qui va toucher l’industrie et les agriculteurs. Le prix de vos traitements médicaux va augmenter parce qu’il n’a tout simplement pas l’argent nécessaire sans toucher à vos soins de santé. Et pendant ce temps, la dette augmente et s’il ne fait pas attention, il pourrait nous entraîner dans la récession »
Enthousiasme des membres du Parti républicain
Majoritaires à la Chambre et au Sénat, ils ont applaudi lorsque Donald Trump a dit que son prédécesseur Joe Biden avait été le pire président de l’Histoire. Ou quand il a salué Elon Musk et son travail avec le Département de l’efficacité gouvernementale (DOGE) pour détecter la fraude, en prenant l’exemple des abus dans les comptes de la Sécurité sociale, la retraite des personnes âgées les plus fragiles économiquement. Il veut récupérer l’argent indûment versé selon lui pour faire baisser les prix, les taux d’emprunt immobilier et redonner de l’argent aux Américains.
Sur l’économie, il a aussi été question des droits de douane qui, « malgré quelques perturbations » - la bourse a par exemple effacé tous ses gains depuis le 20 janvier en 2 jours -, malgré cela, c’est selon lui bon pour le pays. Il se félicite des investissements annoncés par plusieurs entreprises. Des investissements, notamment dans le domaine de l’intelligence artificielle et de la fabrication de puces électroniques, qui sont évidemment réfléchis depuis un moment par les entreprises concernées et qui sont mis en scène depuis le début de son mandat.
Donald Trumpconfirme par ailleurs qu’il veut reprendre le canal de Panama, sans évoquer directement l’option militaire comme il l’a déjà fait. Pas plus que pour le Groenland, pour lequel il renouvelle son intérêt économique et de sécurité, mais en se disant favorable à l’autodétermination des habitants. Enfin surtout, quelques jours après l’invraisemblable incident diplomatique du Bureau ovale, il annonce avoir reçu une lettre du président ukrainien Volodymyr Zelensky lui annonçant qu’il veut faire la paix sous sa direction à lui, qui continue à négocier avec la Russie et que l’Ukraine souhaite signer l’accord qui donne accès à ses minerais et terres rares aux États-Unis.
Inquiétudes pour l’économie américaine ?
Le Wall Street Journal, publication conservatrice et libérale, passe ce discours au tamis avec six éditorialistes qui en ressortent plutôt satisfaits : « Expansion du forage pétrolier, chasse au gâchis dans l'administration fédérale, répression du crime dans les centres urbains, expulsion de sans-papiers… Les 4/5èmes de ce discours sont des mesures largement soutenues par les Américains ».
Mais l’exercice se corse quand il s’agit des droits de douane. Sur ce point, « son discours sonnait comme au bon vieux temps du protectionnisme », tacle le Wall Street Journal. « Difficile d'entendre parler de victoire pour les consommateurs américains lorsque, par exemple, M. Trump rend les importations de fruits et légumes encore plus cher. Vu à quel point les électeurs en voulaient à Joe Biden pour la hausse des prix, Donald Trump a peut-être tendance à minimiser le risque politique quand il annonce une « légère perturbation » en matière commerciale. »
Au passage, petite gifle pour les démocrates, les plumes du Wall Street Journal s’en donnent à cœur joie : « Avec leurs phrases toutes faites sur quelques pancartes, comme «Musk est un voleur» ou «Faux», les démocrates avaient l'air plutôt ridicules. Sans parler de ces élues habillées en rose pour protester contre les mesures de Donald Trump envers les femmes. Tout ce que les Démocrates ont mis en œuvre hier soir dans l'hémicycle nous confirme une fois de plus pourquoi ils ont perdu au mois de novembre ».
Et les signatures du New York Times ne sont pas loin de penser la même chose, prenons Michelle Goldberg pour n’en citer qu’une : « les démocrates n'auraient tout simplement pas dû venir. Et quitte à y aller, pourquoi se munir de ces pancartes stupides. Si ce n'est pour servir de faire-valoir à un autocrate trop content de couper l'Amérique en petits morceaux ».
Fin du TPS et recours en justice
Parmi les dizaines de procédures judiciaires intentées contre l’administration Trump depuis le 20 janvier, il y a ces recours contre la fin programmée du TPS (Temporary Protected Status). Joe Biden avait étendu ce dispositif d'accueil jusqu'en février 2026 pour les ressortissants haïtiens, mais la nouvelle Maison Blanche ne veut plus en entendre parler et a choisi d’inverser cette décision, il y a quinze jours. Par conséquent, au-delà du 3 août 2025, tous les Haïtiens présents aux États-Unis par le biais du TPS risquent de se retrouver dans l'illégalité.
Quatre d'entre eux, appuyés par trois organisations, viennent d'attaquer cette décision. NBC News cite l'un des leurs avocats : l'idée de supprimer le TPS pour Haïti et le Venezuela « répond à des préoccupations raciales et n'a aucune considération pour la réalité de ce que vivent ces communautés ». Son principal argument juridique : l'actuelle administration américaine n'a pas le pouvoir de revenir sur le délai déjà gravé dans le marbre par l'équipe Biden.
L’agriculture en Haïti en danger
Les conséquences de la crise sécuritaire se font particulièrement sentir chez les agriculteurs haïtiens qui ne peuvent plus vendre leur production. Les routes sont trop dangereuses, contrôlées par les gangs qui rackettent les voyageurs et les cargaisons de fruits et de légumes ne parviennent pas jusqu'aux grandes villes. Conséquence : les producteurs perdent de l'argent et les chauffeurs de camions ne travaillent plus. C’est le cas notamment dans la commune de Fonds-Verrettes, à l’est de Port-au-Prince. Reportage de Peterson Luxama à réécouter dans son intégralité dans l’édition du jour.
L’actualité des Outre-mer avec nos confrères de la 1ère
En Martinique, le roi du carnaval s’est embrasé à Fort-de-France avec 24 heures d’avance, accidentellement et à la grande stupéfaction des spectateurs présents lors du défilé du Mardi gras.