1/3 Séoul, avant l'exil – Les mondes de Yooree
03 April 2025

1/3 Séoul, avant l'exil – Les mondes de Yooree

Alter ego

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Yooree nous plonge dans ses souvenirs, et raconte les premières années de sa vie. Elle voit le jour dans une famille modeste, dans la Corée des années 1970, contrôlée d’une main de fer par l’armée. Pour Yooree et son frère, l'enfance est parsemée d’épreuves et de brefs moments de répit. Jusqu’à ce jour de mai 1984, qui fera basculer sa vie. 

Avant l’exil : enfance abandonnée, la Corée effacée 

Entre 1970 et 1990, plus de 200 000 enfants sud-coréens ont été adoptés à l’étranger. Derrière cet exil massif dissimulée par des justifications humanitaires, se cache une politique d'exportation de masse marqués par le déracinement et le mensonge. Cette histoire a bouleversé des vies, comme celle de Kim Yooree, adoptée en France à l'âge de 11 ans. 

Dans ce premier épisode du podcast Alter Ego, Yooree revient sur son enfance à Séoul. Après le divorce de ses parents, elle et son frère se retrouvent livrés à eux-mêmes. Elle raconte leurs errances, leurs ruses pour survivre, et la peur constante d’être envoyés en un foyer. 

« Le soir, il y avait un couvre-feu. Donc on restait dans le marché et on dormait sous des chariots. Des fois, on voyait les lampes des flics qui faisaient la ronde et je disais surtout de ne pas bouger, ne pas crier, rien, ne pas parler. Parce que s'ils nous attrapent, ils vont nous envoyer dans un orphelinat. On ne veut pas aller dans un orphelinat. » — Kim Yooree 

Un exil institutionnalisé sous dictature 

Au moment où Yooree entre à l’orphelinat, la Corée du Sud est dirigée par une junte militaire déterminée à offrir une image moderne du pays lors des Jeux olympiques de 1988. Une politique brutale de "purification sociale" cible les populations marginalisées : enfants errants, mendiants, handicapés. L’orphelinat, parfois une solution temporaire pour les parents pauvres, devient un sas vers l’adoption internationale, au mépris des droits familiaux. 

« La violence et la faim c’est ce qui m’a le plus frappé, je suis resté presque 23 mois là-bas [à l’orphelinat]. Je me disais que si mes grands-parents savaient, ça serait impossible qu’ils nous laissent dans un endroit aussi inhumain. » — Kim Yooree 

Une mémoire collective effacée 

Le récit de Yooree, accompagné par la voix du journaliste Nicolas Roca, ancien correspondant de RFI à Séoul, met en lumière les zones grises d’un système d’adoption internationale orchestré à grande échelle, sans contrôle, ni suivi. Yooree incarne cette mémoire invisible des enfants confiés à des étrangers  à l'autre bout du monde, sans consentement, ou explication. 

Écoutez Les mondes de Yooree : Séoul, avant l’exil pour comprendre l’envers d’une politique d’adoption de masse méconnue, entre silence, résilience et injustice. Abonnez-vous à Alter Ego pour découvrir les autres volets de cette série sur l’exil et la quête d’identité. 

Auteur : Nicolas Rocca

Réalisation : Simon Decreuze, Valentin Wanner et Sylvain Pinot. 

Musique originale : RFI Instrumental