Gallium, tungstène, titane... l'Otan a listé 12 matières premières essentielles au secteur de la défense. C'est la première fois que l'organisme établit une liste de ce genre et c'est une preuve que le sujet « monte ». Mais le défi est que cette liste débouche sur la constitution de stocks stratégiques dans les pays où il n'y en a pas, comme en France par exemple.
Le plus connu, l'aluminium, entre dans la composition des avions et des missiles. Le graphite est utilisé dans la production de chars de combat et dans les sous-marins. Le cobalt, lui, sert à fabriquer de superalliages utilisés dans les moteurs à réaction. Et comme ça, il y en a douze. Douze métaux et minerais listés par l'Otan, qui sont jugés essentiels. Ce ne sont d'ailleurs pas les seuls, car la liste est en réalité plus longue, mais les absents, comme le rhénium — incontournable pour les turbines aéronautiques — sont moins exposés à un risque géopolitique.
Après l'identification, l'action ?
À quoi peut maintenant mener cette nouvelle liste ? L'Otan ne dispose pas de moyens industriels ni de capacités propres de stockage, mais l'idée affichée par l'Alliance est de mettre en place « des chaînes d'approvisionnement plus solides et mieux protégées ».
Dans les faits, cette nouvelle liste s'adresse aux pays membres de l'Otan qui sont très inégaux sur le sujet : les États-Unis sont les seuls au sein de l'organisation à avoir développé une stratégie de stockage de métaux et minerais critiques. Et rien ne dit qu'aujourd'hui les autres membres vont s'y mettre.
Cela fait plus de 15 ans en effet que l'Union européenne publie, elle aussi, des listes de matières critiques, pointe Raphaël Danino-Perraud, chercheur associé à l'Institut français des relations internationales (Ifri), mais à ce jour, les pays membres ont pris peu d'initiatives industrielles, et encore moins développé de coordination entre eux sur le sujet. Le stockage, qui n'est qu'une des composantes de la stratégie globale que les États pourraient mettre en place, n'a pas non plus progressé. En France, plus aucune initiative concrète n'a vu le jour depuis la dissolution de la Caisse française des matières premières en 1996.
Ce qui pêche aujourd'hui, c'est l'absence de compétence, pointe l'expert, face à la complexité du sujet ainsi qu'un manque de moyens dédiés à l'analyse des vulnérabilités de chaque maillon de la chaîne.
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Acheter des métaux quand les prix sont bas
« À un moment, il faut passer à l'action et acheter des métaux tout simplement ! Et si possible acheter quand les prix sont bas », complète Vincent Donnen, patron de la Compagnie des métaux rares (CDMR), société de conseil spécialisée dans les métaux critiques.
« Avec 100 millions d'euros, on peut déjà constituer un premier stock », assure l'expert. Un stock au service des industriels, qui serait soutenu par les pouvoirs publics, à l'image de ce qui existe déjà au Japon, en Chine ou encore en Corée du Sud.
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