L’année du lapin fertile

L’année du lapin fertile

RFI
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La Chine et d’autres pays d’Asie fêtent aujourd’hui le Nouvel An lunaire, placé cette année sous le signe du lapin. Un mammifère réputé pour sa fécondité.

Chaud lapin ! La réputation d’Oryctolagus cuniculus n’est pas usurpée. Avec 3 à 5 portées, une lapine peut donner une cinquantaine de lapereaux par an. Dès que la femelle a mis bas, après un mois de gestation, elle est de nouveau disponible pour le mâle. C’est presque sans fin, mais ce n’est un hasard.

« Dans la nature, d’une manière générale, et pour schématiser, on a deux grands types de reproduction animale », explique Violaine Nicolas-Colin, enseignante-chercheuse au Muséum national d’Histoire naturelle à Paris et directrice de l’Institut de systémique, évolution et biodiversité. « On a ce que les scientifiques appellent la stratégie K : les animaux à longue durée de vie, qui vont avoir des périodes de gestation longues, qui vont mettre au monde peu de petits, et qui vont s’en occuper longtemps – l’éléphant par exemple. Et puis il y a les stratégies R : on va mettre au monde beaucoup de petits, et la mortalité sera importante. »

Forte mortalité juvénile

C’est à cette deuxième catégorie qu’appartient le lapin de garenne (dont l’espérance de vie à l’état sauvage ne dépasse pas 5 ans) : c’est parce que la mortalité des jeunes lapins est forte qu’ils se reproduisent autant – seulement 20% environ des lapereaux parviennent à l’âge adulte. Les lapins sont aussi la cible de nombreux virus.

Les lapins peuvent faire des ravages. L’Australie l’a expérimenté… Et on connait, depuis quelques mois, grâce à la génétique, l’origine précise de cette invasion : un colon britannique, en 1859, « un chasseur, qui avait décidé d’introduire des lapins », raconte Violaine Nicolas-Colin. « Ils étaient 12 quand ils ont embarqué, et 24 à l’arrivée en Australie. Le lapin n’a pas de prédateur en Australie. Le climat y est favorable. Les lapins peuvent donc s’y reproduire toute l’année. La propagation était de 100 kilomètres par an ! Le lapin est ainsi à l’origine de la disparition de nombreuses espèces végétales. Il surpâture tellement qu’il n’y a plus de végétation, ce qui conduit à érosion des sols. »

Pas de carotte, mais des crottes

Le lapin n’est pas un rongeur (comme le rat ou la souris) mais un lagomorphe. Ses grandes oreilles lui permettent de réguler sa température. Contrairement à une idée reçue, il ne croque pas de carotte. Pour faire le plein de vitamines, il doit manger ses crottes. « Le lapin mange beaucoup de plantes herbacées, ligneuses, avec beaucoup de cellulose », précise Violaine Nicolas-Colin. « Mais ce qui est mal fichu chez le lapin, c’est que toutes les substances nutritives doivent repasser par l’intestin grêle pour être absorbées. L’animal va faire des caecotrophes, des crottes toutes molles, qu’il ingère à nouveau. Ça repasse une deuxième fois dans son tube digestif où là ça peut être complètement assimilé par l’organisme. »

Ressortent alors des crottes plus dures et noires, les seules que laissent les lapins et qui trahissent leur présence, de plus en plus rare en Europe. En France, en 50 ans, la population des lapins a été divisée par 10, à cause des maladies et de l'urbanisation.