Tissage de Séquanie, les créations textiles de Guillaume Millot

Tissage de Séquanie, les créations textiles de Guillaume Millot

RFI
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Guillaume Millot est un véritable passionné du textile. Avec sa marque Tissage de Séquanie, il crée des rideaux, voilages, linge de table, plaids, vêtements ou panneaux muraux. La technique du damassé, qu’il maitrise parfaitement, lui permet de créer des tableaux. La matière lui dicte ses créations textiles et sa matière préférée est la laine. Ses œuvres proposent une perception différente en fonction de la distance du spectateur.

Fabriquées en France, elles s’inscrivent dans un circuit de développement durable et sont à son image : simples, élégantes et visuelles. « La création et la créativité, c’est ce qui me réveille le matin et c'est ce qui me berce le soir avant de m'endormir. La créativité fait partie de mon ADN », nous dit Guillaume Millot, artisan tisserand, artiste textile, designer textile et fondateur de Tissage de Séquanie. « La Séquanie, c’était la terre de la tribu des Séquanes ce qui correspond aujourd'hui à l'actuelle Franche-Comté. Il y a aussi ce clin d'œil au tisserand qui m'a enseigné, m'a appris les gestes de base et dont l'entreprise s'appelait “Tissage de Cornouaille”, je trouvais que c'était un petit clin d'œil sympa pour le remercier de m'avoir transmis une partie de son savoir-faire », ajoute-t-il.

Guillaume Millot est né dans une famille d’agriculteurs. Il a grandi à la ferme et a mis les mains dans la matière très jeune. La nature, les animaux ont toujours fait partie de sa vie et le gout du textile lui vient très tôt, sa fibre artistique s’affirme aussi à travers le dessin, la peinture, la gravure, la couture et le tricot. Polytechnicien de formation, ingénieur des Eaux et Forêts. Il exerce pendant 15 ans dans l’aménagement et le développement du territoire en accompagnant des projets notamment dans la valorisation des métiers d’art.

Sa reconversion comme tisserand d’art lui tombe dessus par le biais d’une rencontre : « Au départ, j'essayais d'apprendre à filer avec un rouet. La personne qui vendait des rouets vendait aussi des métiers à tisser et son mari m'a mis entre les mains un livre de tissage. Je suis reparti avec une espèce de bible sous le bras, sans métier à tisser, sans rouet, mais avec des images recueillies dans un livre où j'ai vu tout ce que l'infinie diversité qu'offrait le tissage. Et je me suis dit “si je vais dans cette voie, je ne vais pas m'ennuyer”, parce que j'arriverai à ne jamais faire deux fois la même chose." ».

Trois jours après, j’étais à la recherche d’un métier à tisser d'occasion. J'en ai trouvé un en Bretagne, à l'autre bout de la France qui m'a attendu sagement le temps que nous soyons déconfinés. La personne qui vendait ce métier à tisser en Bretagne était un tisserand professionnel, lui-même reconverti. J’ai pris une semaine de vacances en Bretagne entre deux confinements où j'ai appris à tisser. Je suis revenu avec un métier en pièces détachées dans le coffre que j'ai remonté en arrivant à la maison à 11h du soir. À minuit, il était remonté, prêt à tisser. »

Coton, lin ou laine, ce tisserand d’art explore la matière pour repousser les limites du savoir-faire et des motifs créés. Sa fibre artistique rencontre aussi une matière : la laine, qui produit différents effets et qui est l’un des fils que Guillaume Millot aime tisser. « Elle a des propriétés très nombreuses et très variées, nous pouvons créer des effets de texture, des effets de brillance assez intéressants », dit-il.

« Avec la laine, nous pouvons plus ou moins la feutrer, lui donner plus d'épaisseur, de souplesse ou de rigidité. Entre un tapis qui va être assez compact, assez dense ou une étole assez vaporeuse, je peux vraiment avoir des effets très différents avec la laine. C'est une matière qui ouvre une infinité et un champ infini de possibilités. Ce qui me convient car je suis quelqu'un de très curieux et qui n'aime pas forcément faire deux fois la même chose. Pour moi, c'est la fibre reine, comme toutes les fibres, elle a son petit tempérament. C'est une fibre qui ne supporte pas la violence. C'est une fibre qui doit être travaillé avec beaucoup de douceur, sauf dans le cas où on veut faire du tapis, auquel cas on prendra une laine un petit peu plus, un petit peu plus forte pour la tasser un peu plus fort. Mais pour garder la souplesse d’une étoffe, sa fluidité, je ne peux pas tasser la laine de manière démesurée. Il faut toujours la caresser plus que la tasser. La laine, est une fibre douce qu'il faut travailler avec douceur. »

Le métier de Guillaume Millot exige une grande discipline, c’est un travail très physique qui dépend de la taille des métiers à tisser, de la matière et de la dimension de la pièce réalisée. « Je tisse en général entre 1.20 et 1.80 mètre. Sur des grandes largeurs, cela commence à être physique. Après, sur du tapis ou sur du lin, oui, c’est un travail très physique. Pour un grand plaid, tout dépend si je le produis en petite série ou si je le fais en pièce unique. Pour un plaid de 140 cm par 180 cm, si je le fais à l'unité, il faudra à peu près 15h de travail. L'intérêt de le faire en petite série, c'est-à-dire de monter une seule chaîne sur le métier pour faire cinq ou six plaids derrière, le temps de travail passe à 5 ou 6h de travail par plaid.

Au-delà, de l'économie de temps et de proposer des pièces qui sont financièrement plus abordables, j’évite aussi énormément de gaspillage. Rapporté à un plaid, ce gaspillage est potentiellement à hauteur de 15% et je trouve que sur une pièce gaspillée, 15% de la matière, c'est ne pas respecter le travail de tous ceux qui sont passés avant, le travail de l'éleveur qui a pris soin de ses brebis, le travail des trieurs qui ont fait le tri des toisons ou encore du filateur ou du teinturier. Pour moi, c'est important de valoriser au maximum le travail de ceux qui sont avant moi dans la filière. C'est pour cela aussi que je préfère travailler par petites séries. »

L’atelier de tissage de Séquanie, est ouvert à la visite. Guillaume Millot aime créer du lien humain. Plus qu’un métier, être tisserand, c'est une philosophie, du développement durable et une fabrication française. Un artisanat local pour un développement local.« Très clairement, cela a été un choix assumé dès le lancement de mon entreprise. Mon entreprise et mon atelier pourraient être visités par les touristes de passage et contribuer aussi au rayonnement touristique de la région dans laquelle je suis implanté. Cela commence à se vérifier puisque j'ai régulièrement des appels de gens qui m'appellent en me disant “nous sommes de passage dans la région, est-ce que nous pouvons venir visiter l'atelier ? Nous ne sommes pas très loin de chez vous, est-ce que nous pouvons venir jeter un coup d'œil ?” Et puis, j'ai développé des savoir-faire très rare, unique en France, mais peut-être même unique sur la planète. Je commence à avoir des stagiaires qui viennent d'un peu loin pour se former chez moi parce qu'ils trouvent chez moi des techniques qui n'existent nulle part ailleurs. Oui, cela fait venir du monde, il y a des retombées chez les hébergeurs touristiques, il y a des retombées chez les commerces locaux parce que ce sont des gens qui, pendant une semaine, vont consommer local. »

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